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SMALL THINGS LIKE THESE

Un film de Tim Mielants

Loin de la compassion

William (Billy) Furlong est un livreur de charbon dans l’Irlande de 1985. Marié et ayant cinq filles, il voit la misère se répandre autour de lui, apercevant une jeune fille en pleurs forcée par sa mère à rentrer chez les soeurs, un adolescent ramassant du bois loin du village ou même un enfant buvant le lait du chat des voisins en pleine nuit. Livrant le couvent, il est également pris à parti par une jeune femme qui lui demande de l’aide, le suppliant de l’emmener vers la rivière…

Porté par un Cillian Murphy ("Oppenheimer") une nouvelle fois saisissant, "Small Things like These", adapté du roman de Claire Keegan, est un film d’une rare âpreté. Avec un énorme travail sur le son, Tim Mielants met en évidence la révolte qui gronde en ce personnage qui sait à quel point il a eu, malgré divers malheurs, de la chance. Car face à la pauvreté grandissante et à la détresse de jeunes femmes visiblement maltraitées dans le couvent local, c’est l’éveil de sa conscience qui intéresse le metteur en scène. Alternant les moments en apparence anodins d’un quotidien aussi sombre que la météo locale, et des flashs back sur son enfance, auprès de sa mère et son aisée employeuse, c’est l’ombre de sa propre pauvreté passée qui refait surface, en cette période de Noël, avec la notion de compassion.

En opposant le quasi mutique personnage principal, à d’autres moins concernés, de sa femme pleine d'a priori sur les autres, mais consciente que leur chance pourrait bien tourner, à la mère supérieure du couvent (Emily Watson, rigide à souhait), c’est la loi du silence autour des agissements des sœurs Magdelene qui est ici visée. Le film est d’ailleurs dédié aux quelques 10 000 victimes de celles-ci et aux enfants qui leur ont été enlevés. Mais si le film nous happe par sa noirceur, c’est grâce à son sens de la suggestion (les cris lointains d’un bébé alors que Billy raccompagne une jeune fille mal en point, trouvée dans un abri voisin, la vision d’une multitude de jeunes filles travaillant avec acharnement pour les sœurs dans un long et inquiétant plan séquence...) et surtout à quelques scènes, particulièrement tendues, qui questionnent l’humanité du personnage (Billy envahi par la hargne, son souffle alternant avec des coups de pelle dans le charbon...), ou des responsables du couvent (l’attitude de la mère supérieure, autoritaire et inquisitrice avec une jeune fille qui lui est ramenée...). Au-delà de ça, c’est tout un système d’emprise d'une église qui s’accapare les richesses et contrôle éducation comme une partie des emplois qui est subtilement mis en évidence, dans ce long métrage aussi sombre que sobre.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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