PRIS AU PIÈGE

Individualisme à tout crin

Dans un bar de centre de Madrid, patronne et clients se trouvent tout à coup confinés, chaque personne essayant de sortir étant abattue. On trouve ainsi dans les lieux, un geek, un malade, une vieille dame riche, un homme en costard, une belle femme, un SDF, un serveur et sa patronne… Chacun se demande se qu’il se passe à l’extérieur et les hypothèses vont bon train, entre attaque terroriste, tireur isolé, rêve collectif…

Diffusion sur Netflix à partir du 25 septembre 2017

Alex de la Iglesia était à la fête au Festival de Berlin 2017, où il présentait à la fois sa dernière production côté Panorama (l'hallucinant "Pieles", conte macabre sur la différence, tout en rose) et son nouveau film de réalisateur, côté Hors compétition. Nous proposant un huis-clos situé dans un bar de Madrid, dans lequel il enferme patronne, employé et clients occasionnels ou habitués, il nous livre un film flippant et barré, n’hésitant pas à donner dans le sanguinolent. L’auteur de "Balada Triste" et des "Sorcières de Zugarramurdi" montre, avec un scénario évoquant certes celui de "REC" de Paco Plaza et Jaume Balaguero, qu’il n’a rien perdu de son sens du rythme, du suspense et du macabre. Prenant une nouvelle fois un groupe de personnes, sur lesquels il fait porter le doute et la pression un à un (voir son cultissime "Mes chers voisins", l’inégal "Un jour de chance", ou le récent "Mi gran noche"), il réussit ici un nouveau film intense mettant l’accent sur l'individualisme galopant.

Très physiques pour ses huit interprètes principaux (dont la toujours surprenante Carmen Machi, et le caméléon Mario Casas), les rôles proposés ici font appel aux instincts les plus viles de l'être humain. Servi par une caméra en mouvement permanent, saisissant aussi bien l'animation de la rue et le croisement des êtres en tournoyant, que la panique en s'accrochant aux personnages, ou le mépris par une contre plongée filmant un groupe, ou encore la rage montante en livrant un soudain effet de zoom, le film surprend et apporte son lot de sursauts.

Maniant à merveille des répliques cinglantes, une violence incontrôlée et un humour noir assumé, le scénario nous emmène dans une première partie dans des contrées paranoïaques savamment exploitées. S’il ménage le suspense pendant un certain temps, brouillant délicieusement les pistes, il surprend moins dans sa seconde partie, virant alors au pur survival, exploitant à la fois réflexes idiots, instincts tactiques amoraux et allusions aux préoccupations mesquines des uns et des autres. On se régale à la fois des parallèles religieux (la figure récurrente du Christ...) ou littéraires (le Petit Poucet) et des épreuves infligées à des personnages que rien ne semble devoir sauver.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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