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PERSONNE N'ATTEND LA NUIT

Un film de Isabel Coixet

Une aventure sans grand souffle

1908 dans les contrées glacées du Canada. Joséphine part à la recherche de son mari, lui-même lancé dans une expédition visant à trouver le Pôle Nord. Le voyage ne sera pas sans difficultés...

Alors que son précédent film, « Ayer no termina nunca », est toujours inédit en salles en France, et que « Learning to Drive » (avec Patricia Clarkson et Ben Kingsley), prévu pour une sortie au printemps en Espagne, peine à trouver un distributeur, la catalane Isabel Coixet présentait en ouverture du Festival de Berlin « Nadie quiere la noche », aventure humaine (et surtout féminine) dans les étendues du Grand Nord. La déception fut à la hauteur de l'attente, le film offrant néanmoins un nouveau beau rôle à Juliette Binoche.

Réalisatrice des bouleversants « Ma vie sans moi » et « Carte des sons de Tokyo », elle confirme son intérêt pour des personnages de femme forte, aux blessures profondes, face notamment aux comportements masculins. Portrait d'une femme d'aventurier (Joséphine), partie rejoindre son mari dans les étendues enneigées, le film s'enlise peu à peu en imposant en reflet celui d'une femme inuit (Alaka), enceinte. Réduisant progressivement l'intrigue à un huis clos, le scénario n'évite pas la lourdeur dans la confrontation entre les deux femmes, forçant un dialogue à la Greystoke plutôt que de privilégier les silences et explicitant à outrance par des phrases simplistes, ce qui ne le nécessitait pas (la fourrure qui devient combustible ou nourriture...).

Du coup, la notion d'épique vient cruellement à manquer, le parti-pris étant de se focaliser sur cette femme à l'idéal élevé et aux principes arrêtés (elle demande aux femmes inuits de se couvrir, choquée par leur nudité...). L'exaltation affichée par le personnage, qui méprise les dangers qui l'entourent (froid, avalanche, banquise qui se rompt...), ne trouve pas vraiment sa traduction à l'image, la réalisatrice privilégiant les fébriles gros plans aux plans larges. Et son grand Nord s'enlise peu à peu dans cette nuit éternelle de l'hiver, provoquant un certain assoupissement.

Si elle préfère intelligemment, au fait de montrer l'accouchement, l'utilisation d'une belle parabole d'éclosion à partir d'un igloo enseveli sous la neige, les messages restent tout de même fortement appuyés. L'aventure manque donc de souffle et d'émotion, alors que la rencontre humaine a pourtant lieu et que les enjeux intimes existent bel et bien. Dommage.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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