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LA NUÉE

Un film de Just Philippot

Les limites du sacrifice au travail

Virginie, exploitante agricole, s’est lancée dans l’élevage de sauterelles comestibles afin de sauver son exploitation. Regardée avec défiance et curiosité par les autres paysans, de moins en moins respectée par ses enfants qui se sentent délaissés et doivent affronter les moqueries de leurs camarades, elle doit faire face à des difficultés grandissantes liées à une production trop restreinte. Jusqu’au jour où elle découvre un moyen de faire se démultiplier les sauterelles…

La nuée film movie

"La Nuée" aurait dû faire les beaux jours de la Semaine de la critique de Cannes 2020. Mais la pandémie en aura décidé autrement, et cet excellent film à suspense aura été dévoilé au public lors du Festival d’Angoulême, en août, avant de passer par le réputé Festival du film fantastique Sitges 2020, d'où il est reparti avec le Prix spécial du jury et le Prix d'interprétation féminine pour Suliane Brahim, et d’être présenté à Gérardmer en ce début 2021. Premier long métrage de Just Philippot, le film allie à la fois des qualités graphiques, un fond social contemporain, des composantes de drame intime avec notamment des personnages consistants et complexes, et un réel suspense.

Dès les premières scènes (un plan zénithal sur des vignes, de nuit, puis des chemins enneigés entourés de forêts, nous amenant à la ferme...), l’ambiance semi-fantastique s’impose. L’exploitation est montrée comme un lieu à part, avec cet étrange dôme laboratoire et ces tentes dans lesquelles pendent des sacs où les sauterelles semblent grouiller, qui forment une sorte de sanctuaire expérimental. Leur présence, suggérée en grande partie par leur bruit, ne prendra forme que progressivement, soulignant le drame intime que vit cette femme, enfermée dans une logique de productivité qu’elle voit comme seule issue pour sauver son exploitation.

Récit de l’entêtement, du sacrifice et de l’épuisement au travail, le scénario de "La Nuée" construit une belle parabole sur la situation des exploitants agricoles face au marché, tout en nous faisant témoin du cul de sac dans lequel s’est engoufrée une famille au bord de l’implosion. Le choix de Suliane Brahim pour actrice principale, sociétaire de la Comédie-Française, que l'on a pu voir notamment au cinéma dans "Hors Normes", s'avère particulièrement judicieux. Le fait qu'elle soit encore peu connue du grand public permet de ne pas détourner le spectateur de l'enjeu que représentent les sauterelles, et son implication physique comme psychologique nous laisse à bout de souffle. Entre effets spéciaux discrets, musique aux cordes dissonantes, la menace sur sa ferme comme sur sa famille se concrétise avec efficacité, entraînant forcément des dommages collatéraux, tout en alignant au final quelques scènes horrifiques mémorables.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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