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LA FILLE INCONNUE

Un Dardenne qui s’égare dans le polar

Jenny Davin est médecin généraliste dans une banlieue de Liège. Un soir après la fermeture, elle donne ses derniers conseils à Julien son stagiaire, quand quelqu’un sonne. Elle refuse qu’il aille ouvrir, partant du principe que si c’était vraiment urgent la personne aurait sonné plusieurs fois. Le lendemain on retrouvera au bord du canal, le cadavre de cette inconnue venue demander refuge au cabinet…

Un drame social, une héroïne pleine d’humanité, un sentiment de culpabilité : voilà de quoi fournir un excellent terreau aux frères Dardenne pour mettre à nue toutes les nuances de la nature humaine. Ajoutons à cela une once de suspense et nous voilà déjà enclin à nous émouvoir du désespoir des oubliés de notre société. Connaissant le talent presque chirurgical des deux cinéastes à révéler l’intensité dramatique du moindre geste anodin, nos petits curs de cinéphiles trépignent, se réjouissant presque d’affronter une nouvelle démonstration de la cruauté humaine.

Un tel engouement s’explique par la prédisposition qu’ont les réalisateurs à créer des personnages d’une infinie justesse. Des personnages (souvent seconds rôles) qui face à la détresse sont profondément bons et font preuve d’une réelle empathie envers ceux qui souffrent. C’est le cas ici de Jenny Davin, une médecin dévouée qui ne semble vivre que pour son métier. Droite comme la justice, la jeune femme est résolue à retrouver l’identité et les proches de la femme qu’elle n’a pas pu sauver de son agresseur.

Dans cette quête humaniste, le film ne connaît aucune fausse note. Adèle Haenel, joue à la perfection la force tranquille de quelqu’un qui ne peut plus avancer tant qu’elle n’aura pas rattrapé son « erreur ». Pour cela, elle refuse son nouveau job dans une clinique privée et emménage dans son cabinet de banlieue pour s’investir totalement dans ses recherches. Malheureusement, sa dévotion pour que la fille inconnue soit enterrée avec dignité, s’accompagne très vite d’une autre obsession : celle de démasquer le tueur.

Ses investigations en marge de l’enquête officielle prennent très vite le dessus sur le discours social. Le film glisse alors doucement dans un registre plus convenu, celui du polar terne qui use de quelques raccourcis pour arriver à ses fins. Une inversion du genre que les cinéastes assument assez mal au final. L’enquête manque de mordant et l’intrigue n’est pas très étoffée. En résulte un film en demie teinte qui promet du grand cinéma dans ses premières minutes pour finalement se délayer dans une pâle fiction digne des romans de gare.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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