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ÉLÈVE LIBRE

Un film de Joachim Lafosse

Sans limites mais finement maîtrisé

Jonas, un adolescent de seize ans passionné de tennis, est en plein échec scolaire et découvre aussi sa première fois avec sa copine. Les amis de sa mère, avec qui il est très proche, vont l’aider à surpasser ses moments de doutes et Pierre, un trentenaire très érudit, va le prendre sous son aile et tenter de lui faire passer son Bac en candidat libre. Les révisions scolaires vont peu à peu se transformer en une autre forme d’apprentissage…

Il est de ces films dont le sujet peut bouleverser et le traitement révulser, sans pour autant empiéter sur ses qualités intrinsèques. On pense à « Irréversible », « Short Bus » ou encore « Mysterious Skin ». Si vous n’avez jamais trouvé aucune qualité à l’un de ces trois longs métrages du fait de la crudité de leurs images, alors inutile de continuer à lire, « Elève Libre » n’est pas fait pour vous.

« Elève Libre » suit un jeune en proie aux doutes de l’adolescence : « mes notes sont nulles, je suis un vrai raté ! », « j’ai raté mon match de tennis, pourquoi faut-il toujours que je foire toujours tout ? », « suis-je assez bien pour elle ? », « suis-je assez bon au lit ? ». Ces questions, Jonas se les pose mais il est épaulé par les amis de sa mère qui, elle, est toujours absente. Tout du long, plusieurs interrogations sont abordées. Au-delà des limites à ne pas franchir en matière d'éducation, grande thématique du film, « Elève Libre » démontre que l’initiation sexuelle ne doit pas se faire lors de cours. Il est plus sain de la découvrir par soi-même et en couple. Les séquences avec Jonas et sa copine (personnage que l’on aurait aimé voir plus approfondi) révèlent efficacement la position du réalisateur. La délégation de l’éducation de ses enfants à d’autres est elle aussi abordée, tout comme la réciproque fascination entre adultes et adolescents.

Tous ces thèmes sont subtilement amenés. On peut trouver le film long, mais le décor et les personnages se construisent lentement pour crédibiliser les scènes les plus crues. De facto, lorsque l’éducation sexuelle de Jonas dérape en une initiation sordide et limite pédophile, on est écœuré mais pas incrédule face à ces situations aberrantes. Le réalisateur peut d’ailleurs remercier ses comédiens (particulièrement Jonas Bloquet et Jonathan Zaccaï) qui sont d’une remarquable justesse et épargnent au film de sombrer dans l’incongru et la polémique sensationnaliste gratuite.

A l’image de « Mysterious Skin », on passe de la stupeur au dégoût mais contrairement à un Larry Clark, par exemple, les scènes ne dévoilent pas grand-chose mais suggèrent énormément. C’est choquant et il est compréhensible de détester le film pour ce qu’il montre. Mais s’il l’on prend assez de recul, on peut reconnaître qu’ « Elève Libre » va habilement jusqu’au bout de ce qu’il a à dire. On regrettera cependant une fin trop abrupte et un manque de rythme dans le montage de certaines séquences mais globalement, l’ensemble est suffisamment maîtrisé pour amener une vraie réflexion sur la sexualité et le libre arbitre. Un film dédicacé à nos limites et à ne pas mettre devant tous les yeux…

Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur

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