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DON JON

Une petite comédie hyper-vitaminée et jouissive

Don Jon approche la trentaine. Il n’y a pas une soirée où il n’emballe pas, devant ses potes, l’une des plus belles filles qu’il croise. Mais Don Jon préfère aux relations sexuelles, la pornographie, qui provoque chez lui une excitation hors du commun...

Après sa présentation à Sundance, et un succès public mérité lors de sa présentation dans la section Panorama Spécial du Festival de Berlin 2013, "Don Jon" (plus explicite avec son titre anglais "Don Jon’s Addiction") a enfin réussi à trouver le chemin des salles françaises, jusqu’à s’offrir une étonnante sortie... pour Noël. Il faut dire que le sujet du premier film en tant que réalisateur de l'acteur américain Joseph Gordon-Levitt ("Inception", "500 jours ensemble", "Looper"), l’addiction au sexe, n’a pas vraiment de rapport avec la fête en question, mais pourrait s’offrir un joli petit succès auprès des adolescents, pendant les vacances scolaires.

Le pitch a en tout cas de quoi intriguer. Un dragueur invétéré, t-shirt moulant et sourire ultra-brite, passe son temps en soirées, à la recherche d’un « ten » (10, soit la note qu'on mettrait à une fille super bien gaulée...) avec laquelle s’adonner à quelques ébats. Réussissant toujours à ramener la proie choisie, il fait l’admiration de ses amis, leur grillant même parfois la politesse. Mais dans son monde à la routine bien huilée, fait de salle de gym, de night-clubs et de parties de jambes en l'air, il n'y a qu'une seule chose qui surpasse tout et provoque réellement l’orgasme chez lui : la pornographie.

Résolument dans l'air du temps, "Don Jon" aborde sous l'angle de la comédie speedée, la thématique de la dépendance au porno, ceci à l’aide d'un montage serré et répétitif, détaillant à la fois la dichotomie mentale que le personnage applique sur les corps de femmes qu'il matte (soit son instinct de chasseur), et les théories qui font de sa vie une série de tocs sans perspective réelle (en voix-off, le personnage nous assène sa technique pour se masturber et développe toute une théorie sur ce qui est bon ou non au pieu).

S'inscrivant parfaitement dans l'ère du « tout, tout de suite » et de la recherche permanente du nouveau et du meilleur, le personnage principal (interprété par Gordon-Levitt lui-même) va avoir fort à faire lorsqu’il rencontrera Barbara (Scarlett Johansson, plus glamour que jamais), jeune femme manipulatrice qui sait jouer de ses formes pour arriver à ses fins. Ceci d’autant que ce personnage, finement écrit, joue sur tous les tableaux, allumant à tout va, pour mieux refroidir par la suite avec des « principes » de chasteté qui contrastent à merveille. Mais les plaisirs coupables ont la dent dure.

À des années lumières du "Shame" de Steve McQueen, qui avait déjà fait couler beaucoup d'encre, le film aborde lui aussi l’impossibilité d'avoir une relation stable et l’incapacité de se détourner de l’objet de fantasme. Le scénario offre quelques moments d'anthologie (la première scène charnelle entre Jon et Barbara au pas de la porte, les ahurissantes scènes de repas de famille de Jon avec un père des plus goujats...), et dote cette comédie d’un humour fortement sexué.

Quant à la mise en scène, elle use de répétitions à bon escient, construisant d’emblée le rite qui relie Don Jon à ses vidéos favorites, depuis l’allumage de l’ordinateur jusqu’au jet du kleenex usagé dans la poubelle, auquel s’ajoute une hypocrite et forcément hilarante confession. Et c’est au final ce rythme qui traduit très bien la sensation de zapping dont le personnage est à la fois la victime et le protagoniste. Que les Français se rassurent, contrairement aux Américains, ils auront droit à la version non censurée du film. Jouissif si l’on peut dire.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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