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CITIZEN K

Un film de Alex Gibney

Citizen P

Récit du parcours agité de Mikhaïl Khodorkovski, qui fut l’un des plus puissants oligarques russes avant d’être condamné, enfermé et contraint de quitter le pays pour s’opposer à son meilleur ennemi : Vladimir Poutine…

Citizen K film documentaire image

1989, chute du mur de Berlin, chute d'un empire, chute d'un monde. L'empire soviétique était à la fois un modèle de gouvernance totalitaire, mais également un modèle économique. La fin soudaine du régime fut un choc auquel la nation n'était absolument pas préparé. La transition vers le libéralisme social et l'économie libérale causa un énorme désordre qui fut extrêmement difficile à gérer pour le successeur de Gorbatchev. L'ouverture de la Russie au capitalisme entraina la prise de pouvoir d'un petit nombre d'entrepreneurs qui constituèrent de puissants monopoles industriels. Leur entente leur permit d'organiser la domination d'une économie déstabilisée et fragilisée.

"Citizen K", soit la gloire et la chute de l'un de ces nouveaux rois, qu'a décidé de suivre le documentariste Alex Gibney ("Enron", "Zero Days"). Créateur d'une banque, dirigeant d'un groupe pétrolier, homme le plus riche et influent du pays, avant de finir emprisonné pendant dix ans... Mikhaïl Khodorkovski est effectivement un personnage passionnant. Mais en réalité ce n'est pas lui qui intéresse le réalisateur. Ce dernier vise un plus gros poisson, le plus gros de tous, le Tsar de toutes les Russies, l'un des dirigeants les plus haïs par l'Occident : Vladimir Vladimirovitch Poutine, premier du nom.

Partir de Khodorkovski constitue un point de départ très intéressant, puisque cela permet de rentrer directement au coeur du sujet, à savoir les années de transitions et de crise qui ont suivi la disparistion de l'URSS. Cela permet d'aller chercher au bon endroit, car l'acension des oligarques en dit plus long sur la nature du changement qui transforme le pays, que les coups politiques de Boris Eltsine. Ce dernier aurait d'ailleurs illustré une autre histoire, qui commençait bien avant la chute du Mur et s'arrêtait trop tôt. Ce n'était pas la bonne échelle historique pour comprendre cette période spécifique. Khodorkovski, lui, va naître grâce à la faiblesse de l'État, avant de se retrouver pris à défaut face au retour de sa puissance. C'est en effet l'arrivée soudaine, brusque et totalement imprévisible, d'un nouveau président à poigne, qui va causer sa perte. En cherchant à maintenir sa situation et à se confronter directement à un homme tel que Poutine, l'entrepreneur mettra en péril sa carrière et n'aura plus d'autre choix que de se positionner comme son premier opposant politique. Ce destin nous permet donc de suivre toute la fresque de l'après-URSS, avec ses multiples rebondissements.

Le partis-pris politique du documentaire en gâche pourtant la saveur. Car l'Histoire de la Russie contemporaine n'est pas faite de gentils et de méchants. C'est un pays complexe, avec une Histoire très forte et culture particulière. Le film aurait été plus percutant s'il avait privilégié l'ironie et la distance plutôt qu'en nous imposant ses partis-pris. L'erreur est de vouloir faire de son personnage un héros de la liberté, sous prétexte qu'il est un opposant à Poutine. Cela est-il forcément un gage de respectabilité ? La politique et la biographie du président russe n'est, par ailleurs, pas suffisamment analysée et décryptée par le cinéaste, pour que l'on puisse adhérer à son point de vue sans discussion. Si le talent du documentariste est indéniable, celui du militant est moins convaincant.

David ChappatEnvoyer un message au rédacteur

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