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INTERVIEW

BEUR BLANC ROUGE

Dans le cadre du Festival de Meyzieu, nous avons rencontré le réalisateur de Beur Blanc Rouge, Mahmoud Zemmouri et un de ses interprètes, Karim Belkhadra. Une rencontre placée sous le signe de la convivialité où l’on profite des premiers rayons de soleil du printemps pour s’installer sur u…

Affiche du film Julieta
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Dans le cadre du Festival de Meyzieu, nous avons rencontré le réalisateur de Beur Blanc Rouge, Mahmoud Zemmouri et un de ses interprètes, Karim Belkhadra. Une rencontre placée sous le signe de la convivialité où l’on profite des premiers rayons de soleil du printemps pour s’installer sur une petite place, à l’arrière du cinéma.

Le réalisateur commence par nous expliquer pourquoi il a choisi de faire ce film, et surtout de centrer toute son histoire autour du match France-Algérie. Il était présent lors du match en question et a été particulièrement touché et choqué par les évènements qui y ont lieu lieu. Rappelons-le, en pleine campagne électorale, la Marseillaise avait été sifflée par une partie du public, provoquant la réaction du Président Chirac, avant que le match ne soit définitivement annulé après l’invasion du terrain par les supporters, algériens principalement.

Il nous explique que cet événement avait été le révélateur d’une véritable crise d’identité pour les jeunes d’origines algérienne, qui se trouvent perdus entre la France, leur pays, et l’Algérie, le pays de leurs parents, qu’ils n’ont le plus souvent jamais connu. Et Mahmoud Zmmouri a fait le choix de faire de son film une comédie, car le message qu’il tente de véhiculer ne pouvait que mieux passer avec humour.

Il regrette d’ailleurs que la plupart des films traitant de l’immigration soient trop misérabilistes. Il espère, grâce à l’humour, élargir le public de ces films, et les sortir du ghetto. A travers « Beur, blanc, rouge », il s’adresse à tous, tente d’intéresser tout le monde. Pour lui, le ghetto commence dès Paris. A l’intérieur même de Paris, les jeunes vivent en ghettos, et ont l’impression de changer de pays s’ils vont au Quartier Latin. C’est ainsi qu’ils disent « descendre à Paname » alors même qu’ils habitent Belleville ou Barbès.

Pour ces jeunes qui n’ont jamais connu le bled, il reste cependant un rêve fou, un effet de mode, celui de gagner des millions en France pour pouvoir investir ensuite au Bled. Il constate également que les immigrés en France sont plus royalistes que le roi. Ils restent dans des traditions, une langue, et ne parviennent pas à s’intégrer. Pour le réalisateur, il faut qu’ils coupent le cordon ombilical, mais c’est impossible quand on est cloisonnés dans des quartiers où 80% des gens sont identiques. Il constate que l’émancipation est paradoxalement beaucoup plus forte en Algérie que chez les Algériens de France. Notamment du fait des chaînes câblées qui, en Algérie, véhiculent la culture occidentale, là où en France elles permettent de retrouver de manière factice les traditions de là-bas.

Le tournage s’est fait fin 2003, et il a été très difficile de boucler le budget, mais finalement, ils ont obtenu le soutien de l’Année de l’Algérie en France. Malgré ce décalage dans le temps, Mahmoud Zemmouri voit une forte résonance avec le malaise des banlieues et les évènements d’octobre 2005. Il considère qu’il faut qu’il y ait une volonté globale d’intégration et non d’accueil. Il a aussi fait le choix de renvoyer aux jeunes leur mauvaise image, leur montrer là où ils font des conneries, des erreurs, et ce qu’ils doivent changer.

Il conclu en nous expliquant qu’il sera impossible de revoir un match France-Algérie désormais à cause de cette occasion gâchée. La Fédération ne veut plus entendre parler de ce match, et n’a surtout pas voulu entendre parler du film, et encore moins lui apporter un soutien.

Mahmoud Zemmouri nous quitte en nous parlant de son prochain film, qui traitera de la Guerre d’Algérie : encore un sujet brûlant en perspective.

Rémy Margage Envoyer un message au rédacteur

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