UN ÉTÉ À CHANGSHA

Un film de Zu Feng

Un polar neurasthénique surprenant et ambitieux

L’inspecteur Bin essaye tant bien que mal d’élucider le crime autour d’un jeune homme dont le bras a été retrouvé aux abords d’une rivière. Et alors qu’il pensait ne jamais pouvoir résoudre le mystère, l’arrivée de la sœur de la victime dans sa vie pourrait bien l’aider à y parvenir. Et bien plus…

Un été à Changsha film image

L’été est brûlant à Changsha, les corps moites. L’inspecteur Bin, lui, est fidèle aux archétypes du policier dans les thrillers noirs : la clope au bec, sauf lorsqu’il enfile des antidépresseurs, l’homme étant traumatisé, par le suicide de sa petite amie mais également par toutes les enquêtes qui habitent son quotidien. Alors, il erre, seul, la nuit, dans son appartement, plutôt que de dormir. De toute façon, il ne pourrait pas trouver le sommeil. Tout semble ainsi nous indiquer que le film va s’inscrire dans la plus pure tradition de ces drames asiatiques, façon "Memories of Murders". Il n’en sera rien, cette première réalisation du comédien Zu Feng (aperçu notamment dans "Coming Home" et "Mystery") préférant arpenter des sentiers bien plus sinueux et mélancoliques.

Le postulat est celui de la découverte d’un bras au détour d’une rivière. Peu d’indices sur la victime, jusqu’à ce que la prétendue sœur du recherché cadavre se présente, indiquant qu’elle a également rêvé du lieu où se trouverait le torse du jeune homme. Lorsque la prédiction s’avère exacte, les soupçons se tournent évidemment vers elle, avant d’être rapidement balayés. Car l’enjeu du métrage est ailleurs, dans cette volonté sensible de raconter une Chine dépressive et perdue dans une nouvelle modernité. L’intrigue criminelle sera ainsi résolue à la moitié du film, le cinéaste optant pour une forme fantasmagorique et nettement plus symbolique. Les rayons de soleil ont beau se réfléchir sur les vitres, le résultat sera lui lugubre, poisseux. Si les méandres du récit peuvent quelquefois annihiler les enjeux dramatiques, "Un été à Changsha" s’avère une première œuvre globalement maîtrisée et ambitieuse. Rien de surprenant à ce qu’il ait été sélectionné au Festival de Cannes 2019 dans la sélection Un Certain Regard.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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