THE SUMMER WITH CARMEN
Le film très personnel dans le film
Demosthenes, ancien acteur devenu fonctionnaire, et Nikitas, ancien acteur devenu réalisateur, se retrouvent dans les rochers d’un lieu de drague gay du bord de mer et parlent d’un projet de film. Nikitas espère proposer le projet de « Summer with Carmen » à Jean Sebastien, son producteur, qui voudrait un film à la fois fun, gay et petit budget. Demosthenes, lui, ne fait que penser à Panos, son ex, duquel il s’est séparé après quatre ans de relation…
"The Summer with Carmen", du nom de la chienne du héros, est construit comme l’écriture d’un scénario ou d’une pièce, en différents actes, avec la définition de points de ruptures de l’intrigue mis en avant ou l'inclusion de scènes dans la narration, qui finiront coupées. S’ouvrant sur des plans ensoleillés sur des rochers, où pointent le fessier et les jambes d’un homme, où quelqu’un arborant une pancarte propose de vendre des câlins, voire plus, et des hommes sont en train de bronzer, en maillot de bain ou nu, la présentation du lieu de drague est loin d’être glauque. Dans cette ambiance estivale et lumineuse deux amis, Demosthenes, barbu à la pilosité développée et fier de son corps à la plastique parfaite, échange avec son ami Nikitas, plus réservé et en maillot plus lunettes de soleil, arborant une chevelure teinte en rose et violet (qui changera au fil du métrage).
De leurs rencontres, sur les rochers, au coeur de la gay pride, va naître sous nos yeux une histoire, reflets des regrets de l’un d’avoir rompu avec Panos, l’homme qui a partagé sa vie pendant 4 ans. Symboliquement leur attachement va passer par cette chienne dénommée Carmen, propriété de Panos, mais que Demosthenes va proposer de garder quelques jours, puis semaines, jusqu’à ne plus pouvoir s’en séparer. Le récit se transforme alors en une étrange comédie de mœurs grecque et gay, emplie de réflexions sur la nécessité de s’impliquer, la peur de ne pas satisfaire ses parents, la fidélité en amitié, mais aussi sur le cinéma gay ou non. L'auteur n’hésitant pas face aux scènes érotiques, les buts affichés du héros (dont le sexe en premier) prennent une tournure comique ou critique, appuyés par un plan sur des fesses, première partie du corps à bouger alors qu’un réveil sonne, ou soutenus par une remarque sur le fait que le film (comme la vie finalement) ne doit pas devenir un film porno.
Grâce à son trio d’acteurs avec lesquels l’empathie fonctionne à fond, chacun retrouvera une partie des interrogations qu’il a pu avoir au moment de s’engager, ou dans ses relations avec ses parents. S’ajoute ici la justesse de quelques de dialogues tels que la tirade de la mère de Demosthenes, à laquelle sont faits des reproches : « cite-moi une mère qui n’a jamais été gênée par son fils ». Au final, "The Summer with Carmen" est une comédie fantaisiste ensoleillée, qui convoque la puissance de Maria Callas, des « scènes coupées » comme une fâcherie à oublier, des traumas d’enfance joliment contés sur un toit, mais aussi un épilogue en forme de générique de fin, passant ironiquement en revue les messages portés par le film, et renforçant la mise en abîme que constitue le projet de film... dans le film.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur