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RABIA

Un film de Sebastian Cordero

Un intrus dans la maison

Madrid. Rosa et José-Maria, immigrés sud-américains, viennent de se rencontrer lorsque ce dernier provoque la mort de son chef de chantier. Il doit alors se cacher et trouve refuge à l’insu de tous dans la grande maison bourgeoise où Rosa est employée comme domestique. Rosa, malgré elle, va devenir le centre de tous les fantasmes…

Il existe donc un cinéma en Equateur. Et plutôt de qualité, en ce qui concerne le troisième long-métrage de Sebastian Cortero. Situé dans une Espagne anonyme aux horizons bouchés, "Rabia - la Rage" joue sur plusieurs terrains, la construction du récit s'échinant à couvrir toute l'étendu du spectre narratif proposé par son pitch. Concerné par les problèmes sociaux rencontrés par les siens en exil, Cortero utilise un contexte réaliste (immigration clandestine, racisme, chômage...) pour planter son intrigue et introduire ses personnages, une jeune femme employée dans une famille aisée et un ouvrier impulsif et quelque peu sociopathe. Une ouverture qui propulse rapidement le film sur les rives du thriller romantique, avant d'enfermer les deux amants au sein d'un huis-clos qu'on imagine rapidement étouffant.

Portée par l'interprétation très directe de Gustavo Sancgez Parra, la seconde partie du film plonge au cœur d'un drame kafkaïen, son personnage s'enfermant progressivement dans une folie autodestructrice. Lui, meure à l'étage, si proche de son amour, mais pourtant si loin ; elle, tente de trouver un semblant de vie dans l'absence de son aimé. On se croirait chez le "Locataire" de Polanski, tant l'ambiance lourde et mortifère semble coller à la peau des personnages, alors que la mise en scène très frontale de Cortero rappelle les premiers travaux de Darren Aronofsky ("Pi") ou Shinya Tsukamoto ("Tetsuo"), ajoutant une certaine crudité au malaise ambiant. Crudité heureusement contrariée par un traitement mélodramatique des dialogues et des relations qui l'atténue et apaise progressivement les tensions, et par la belle Martina Garcia, véritable lumière de ce conte baroque. Pour elle, et parce que ce n’est pas tous les jours qu'on peut voir un film équatorien, il serait dommage de rater cette "Rage" des tropiques, chaudement recommandée par Guillermo Del Toro lui-même !

Frederic WullschlegerEnvoyer un message au rédacteur

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