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PORNOMELANCOLIA

Un film de Manuel Abramovich

Le portrait d’une solitude

Alors qu’il travaille en usine, Lalo s’affiche aussi sur les réseaux sociaux, mettant en avant son physique. Il se fait lui-même des séances photos, dans son patio, ou parfois dans l’atelier, en tenue de travail, exhibant discrètement son membre. Suivi par des milliers de followers, il passe pas mal de temps à répondre à ceux-ci. Un jour, découvrant une annonce d’une boîte de production porno, il décide de passer un casting. Il est alors retenu pour jouer une version hard d’Emiliano Zapata, dans un film sur la révolution mexicaine…

Pornomelancolia film movie

Le rythme de "Pornomelancolia" est à l’image du spleen que semble traîner son personnage principal. Sans mot plus haut que l’autre, sans excès, Lalo semble traverser une période de solitude sans précédent, comme déconnecté de tout ce qui se passe autour. On le découvre ainsi à la fois exhibitionniste et observateur silencieux. Passant progressivement par toutes les étapes, de star des réseaux sociaux (il poste sur Twitter des photos qui le mettent en valeur…), à acteur porno et à escort, il se tient à distance d’une discussion sur le mariage à la pause déjeuner de son usine, il écoute ses collègues de tournage vanter les avantages de devenir escort, ne s’impliquant réellement jamais. Et de manière régulière, il laisse un message tendre à sa mère, qu’il n’a jamais directement au téléphone, exprimant son désir de parler de sa vie.

Questionnant sur le niveau de solitude du personnage, sur sa capacité à parler, quelques indices initiaux permettent d’amener une scène clé où il va enfin se livrer un peu, dans tout le tact qui finalement le caractérise. En cela le personnage que « joue » Lalo Santos (nous ne sommes pas dans un documentaire, même si chacun joue ici son propre rôle, du réalisateur aux acteurs pornos), a sa propre morale et ses propres limites. Manuel Abramovich l’accompagne dans ses explorations, laissant les scènes de sexe partiellement hors champs, pour mieux souligner le rapport de son personnage aux ordres de performance qui lui sont intimés. Le réalisateur n’apparaît d’ailleurs dans la première scène de tournage, que sous la forme d’une voix, ventant sa vision positive de la pornographie, avant qu’il n’entre enfin dans le champ dans une scène où le sexe se fait humiliation, vers la fin du métrage. Réflexion sur la masculinité et la responsabilité envers l’autre, "Pornomelancolia" séduit par son esthétique et le portrait intime qu’il livre d’un homme en recherche de contact.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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