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MEMORIAS DE UN CUERPO QUE ARDE

Une belle incarnation des non-dits autour du désir et du corps féminin

Au Costa Rica, Ana, 68 ans, Patricia, 69 ans, et Mayela, 71 ans, ont toutes trois grandi dans une époque où la sexualité était un sujet tabou. Elles se sont adaptées à la répression ambiante et aux attendus sociaux envers les femmes, mais racontent aujourd’hui les tentations, les pulsions et les petits plaisirs secrets, mais aussi des réalités plus graves. Les paroles de ces trois femmes s’entremêlent en voix-off, formant cependant un seul corps à l’écran, en une femme de leur génération…

"Memorias de un cuerpo que arde" (traduire par "Mémoires d'un corps brûlant" ou "Incandescent") est le portrait intimiste, presque de l'ordre de confession, d'une femme costaricienne d'environ 70 ans. Le parti pris, original, est ici d'incarner les voix et souvenirs de plusieurs femmes du même âge, en un seul personnage dont on accède au présent, comme à certains souvenirs par des flash-back. Par l’alternance de leurs voix, comme pour révéler les pensées de celles-ci, c'est l'évolution entre les interdits, parfois transgressés, et un désir aujourd'hui moins réprimé, qui est mis en évidence, tout comme les violences masculines.

Le film démarre ainsi, sur cette vieille dame, refermant sa porte et nettoyant cadres et photos, comme pour mieux introduire les souvenirs qui suivront. Ceux-ci prendront plusieurs formes, plus poétiques par moments, avant de devenir ponctuellement des flash-back. Ainsi lorsqu'une des femmes évoque son enfance au milieu de 300 cochons et 600 poules, quelques poules apparaissent dans le bureau où la femme évolue. Ou lorsqu'une mère est évoquée, celle-ci apparaît dans le siège à côté, avant de s'effacer à nouveau. Ce principe, particulièrement efficace, viendra même envahir une scène d'accouchement, apportant ainsi en miroir une réelle émotion.

Oscillant globalement entre rudesse et une certaine forme de tendresse, le film permet d'évoquer librement mais avec pudeur, de nombreux sujets. Des sujets positifs, comme l'utilisation de bonbons pour s'inventer un baiser, ou la redécouverte de l'orgasme à un âge avancé. D'autres sujets beaucoup plus difficiles, comme l'emprise d'un mari, la violence ou le viol quotidien, certaines portes ou loquets de l'appartement ou de placards permettant de basculer du passé au présent dans une même scène, ou de transmettre une peur et une détresse soudaine. Mais ce sont aussi les conséquences de l'ignorance en termes d'anatomie et de sexualité qui sont ici soulignées, dans ce documentaire-fiction qui a obtenu le prix du Public de section Panorama du Festival de Berlin.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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