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LA MÉCANIQUE DE L'OMBRE

Un film de Thomas Kruithof

Une mécanique plutôt bien huilée

Suite à un burn-out, Duval est licencié. Deux ans plus tard, il participe aux réunions des Alcooliques anonymes et recherche toujours un emploi. Un soir, un certain Clément le contacte pour un entretien d’embauche. L’emploi consiste à retranscrire des écoutes téléphoniques sur une machine à écrire. Duval accepte l’offre, sans se douter que l’une de ces écoutes va l’emmener dans un engrenage qui va le dépasser...

Le film s’ancre dans l’actualité et les questions qui l’entourent : les écoutes téléphoniques (de médias, d’équipes de campagnes ou de services d’espionnage), les campagnes présidentielles, les libérations d’otages au Moyen-Orient, ou encore le burn-out au travail. En ce sens il n’est pas difficile de s’immerger dans cette histoire qui pourrait très bien faire aujourd’hui la Une d’un journal à sensation. En 2017, ce film a une résonance particulière, car le contexte politique de l’intrigue se trouve être aussi une année d’élection présidentielle. Mais il est assez intéressant de voir la façon dont le personnage incarné par Denis Podalydès paraît d’un autre temps dans la façon de procéder sur les écoutes, repoussant toute technologie du 21ème siècle : ordinateur, enregistrement MP3...

Pendant une heure et demi, nous sommes collés aux chaussures de Duval (pas au premier degré bien sûr car un film sur uniquement des chaussures ne serait pas forcément passionnant). Nous n’en savons pas plus que lui et c'est là que résidee la force du film. On suit donc cet homme ordinaire qui va être confronté à des événements qui le dépassent. Il est prisonnier d’une mécanique enclenchée par des hommes haut placés, dont lui n’est qu’un pion. Mais il est aussi prisonnier d’une mécanique plus subtile, celle de son travail où tout n’est que mécanique comme le rappel la mise en scène (le lecteur de bande magnétique de la cassette audio, la machine à écrire, etc.). Et surtout, le travail qu’il accepte est une mécanique en soi, dont il ne doit pas gripper les rouages, tout étant minutieusement minuté, avec des règles strictes. Mais au final, Duval sera le grain de sable de ce système qu’il décidera de ne plus suivre. Dès lors son personnage va sortir du cadre dans lequel il se trouve.

Au niveau scénario, on reste néanmoins, sur quelque chose de classique mais bien ficelé. Cette "Mécanique de l’ombre" est à la fois politique et teintée d’espionnage. Deux bémols viennent cependant ternir un peu ce film. Premièrement la musique, qui appuie beaucoup trop l’action et qui heureusement ne reste pas en tête. Deuxièmement, le rôle féminin (seul personnage féminin du long-métrage d’ailleurs), qui manque de consistance et dont la relation avec le personnage interprété par François Cluzet aurait mérité meilleur traitement. Premier film de son réalisateur, "La mécanique de l’ombre" se pose comme un thriller politique de bonne facture. Un bon de moment de cinéma en somme.

Kevin GueydanEnvoyer un message au rédacteur

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