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LE MAJORDOME

Un film de Lee Daniels

En route pour les Oscars

Après s’être échappé de la plantation de coton où il a grandi, au milieu des années 20, le jeune Cecil Gaines travaille quelques temps dans un hôtel de Washington DC. Repéré par Mr Warner, un habitué des lieux, il est recommandé pour devenir majordome à la Maison Blanche. De 1952 à 1986, il occupera ce poste au service de huit présidents. Les trente années de la carrière de Cecil Gaines à la Maison Blanche, seront aussi celle de la lutte pour la reconnaissance de l’égalité des Noirs Américains. Lutte à laquelle il va assister, tiraillé entre la neutralité que requiert son métier et l’engagement de son fils dans les mouvements militants…

Basé sur l'histoire vraie d'Eugene Allen, majordome noir ayant servi 7 présidents des Etats-Unis, le film de Lee Daniels aurait du être une formidable fresque historique et engagée, de celles qui vous colle la boule au ventre et dont on garde les images en tête longtemps après la sortie de la salle. Une de celles qu'on cite dans les cours d'Histoire.

En effet, comment un film montrant la chronologie des trente dernières années de la lutte menée par les noirs américains pour l'égalité de leurs droits civiques pouvait-il ne pas faire mouche ? Surtout en prenant le point de vue d'un « modèle » d'intégration positive (pour la génération de Cécil Gaines du moins) : le majordome de la Maison Blanche. Peut-être parce que Lee Daniels n'était pas le meilleur réalisateur pour cela…Et même si le box-office témoigne que "Le Majordome" émeut les foules, ce sujet-là méritait un long métrage plus ambitieux et mieux construit.

En fait, seule une partie du récit touche par sa justesse, celle de l'affrontement entre le père et le fils. Quand on comprend que Cecil Gaines, parti de rien, abouti à l'un des postes le plus élevé de la condition noire des années 50, celle de majordome d'une part et au service de la plus haute autorité du pays, le président des Etats-Unis d'autre part. C'est une immense fierté pour lui, sa femme et ses amis ; mais ça reste une place en deçà de ce que peut espérer la nouvelle génération, et en particulier son fils qui, loin d'être fier de son père, choisira de lutter pour ses droits, souvent au péril de sa vie. C'est sur le registre de l'intime que le réalisateur s'en sort le mieux.

Pour le reste, le style est très académique, mené selon un mode répétitif et linéaire qui honore les deux arguments commerciaux du film : une h(H)istoire vraie servie par un casting 4 étoiles. Ainsi, pénétrer les coulisses de la Maison Blanche à travers la longévité d'un majordome au service de 7 administrations différentes, républicaines et démocrates que devront chacune, légiférer sur l'égalité des noirs-américains. Cette alternance, les personnalités des présidents, et leurs convictions respectives ne sont malheureusement que survolées, traitées souvent de manière caricaturale (Nixon écoutant les cassettes audio du Watergate, Johnson tenant un meeting depuis ses toilettes, etc…). Et c'est la même chose pour ce qui est de nous conter l'Histoire ségrégationniste des Etats-Unis : clichés et pédagogie express. On dirait l'adaptation cinématographique d'une page wikipedia, Rosa Parks en moins.

La répartition des rôles, quand à elle, semble faite pour lancer le film dans la course aux Oscars, avec une probable nomination à la clé pour Ophrah Winfrey (Gloria, épouse du majordome) largement servie par un rôle qui semble écrit pour elle.

Finalement, la recette est calibrée pour cartonner, mais elle laisse sur leur faim les amoureux d'Histoire. De la ségrégation à l'administration Obama, la société afro-américaine méritait une fresque historique autrement plus grandiose pour raconter sa lutte et l'ampleur de ses sacrifices. Et "Le Majordome" avait tout pour réussir ce défi.

Loreleï Colin-MoreauEnvoyer un message au rédacteur

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