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MADAME HOFMANN

Un portrait de femme des plus émouvants

A l’hôpital nord de Marseille, Sylvie, 40 ans de carrière, travaille comme infirmière en chef dans le service de pneumologie, où elle dirige une équipe qui l’apprécie. Inquiète pour sa propre santé, alors que sa mère fait une rechute, elle voit aussi arriver l’âge de la retraite. En attendant le service tourne à plein et les difficultés sont son lot quotidien…

La première scène du nouveau documentaire signé Sébastien Lifshitz permet de se situer dans le temps. Au lever, les informations à la radio font état d'un conseil de défense sanitaire. Nous sommes entre le premier et le second confinement, à l'articulation de l'été et de l'automne 2020. Nous voici auprès de Sylvie Hofmann, cadre en pneumologie et donc logiquement en première ligne à ce moment là. Elle passe un examen médical, du fait d'une surdité ponctuelle après son service, qui plus que significative d'un éventuel AVC, pourrait traduire un certain épuisement physique. C'est autour d'elle que nous allons découvrir à la fois une équipe soudée, pleine de bienveillance, dans leurs gestes du quotidien, le contact avec des patients mais aussi la confrontation avec les familles. Mais aussi, à ce moment crucial, où elle va devoir se décider à lâcher prise la retraite approchant, de ses proches, sa mère, 85 ans, faisant une rechute de cancer après 25 ans de rémission, et son compagnon, qui semble l'attendre sagement à distance, dans les Alpes.

Forcément le personnage séduit, par son naturel, sa répartie, son don pour la gestion d'une équipe, loin des conflits, le regard lucide sur sa propre condition alors que de petites interviews introspectives face caméra viennent alterner avec l'hyperactivité à l'hôpital. La mère aussi, apparaît comme une femme courage, à l'incroyable parcours de vie, dont la maladie résonne cependant dans l'inconscient et dans les craintes de Sylvie, avec l'âge. Ces passages apporte de manière surprenante un ton de comédie, au sein d'un documentaire pourtant voué à des sujets graves, et faisant le portrait d'un hôpital public à bout de souffle (manque de personnel, règles instables, charge de travail...), mais au rôle social particulièrement important. Au travers des quelques patients ou familles évoqués, c'est aussi le rôle de lien et d'apaisement des infirmières qui est mis en avant, les moments ou lieux informels, comme la salle café, permettant d'évacuer d'exprimer des émotions parfois pesantes.

Faisant preuve d'une certaine distance, Sébastien Lifshitz et son héroïne, ne détournent jamais le regard, faisant face à la violence quotidienne (les récits des urgences, une réplique bien placée : « les gens croient qu'on est des robots »), aux blessures ou difficultés du passé, et même à la mort, parfois inéluctable. C'est dans les paroles de la mère que la nécessité de ne pas se sacrifier totalement pour les autres, et donc de prendre soin de soin, s'exprimera finalement de la manière la plus directe. Elle qui a travaillé comme aide soignante à l'hôpital de la Timone, et a fini par savoir dire non aux heures supplémentaires. Et c'est à regret que tous, y compris nous spectateurs, devront quitter Sylvie, elle, qui semble avoir un œil à la fois sur le passé (ses mille vies professionnelles, sa mère, leurs photos...) et vers l'avenir (son compagnon, le repos tant mérité, sa fille et son petit fils...). Alors qu'il s'éloigne des thématiques du genre et de ce qu'est devenir femme, Sébastien Lifshitz nous livre ici un superbe documentaire, à la fois touchant et humain.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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