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LOVE & FRIENDSHIP

Un film de Whit Stillman

Stillman fait danser les mots pour dresser un nouveau portrait de femmes étonnant

Sa fortune ne cessant de se réduire, la veuve Lady Susan Vernon se lance dans une quête bien précise : trouver un mari pour elle et sa jeune fille. Et pour parvenir à ses fins, elle est prête à toutes les manipulations…

Il y a déjà dix-sept ans, sortait sur les écrans une comédie originale et savoureuse, "Les Derniers Jours du disco", célébration du bon mot et des dialogues aiguisés. Depuis, le réalisateur Whit Stillman n’avait tourné qu’un seul film, le tout aussi excellent "Damsels in Distress", avec ce même sens de l’humour raffiné. "Love & Friendship" s’inscrit dans cet univers si particulier de son auteur, ce talent pour faire des comédies de mœurs au charme ravageur tout en pénétrant un milieu social pour en décortiquer les us et les coutumes sous le prisme de la caricature. Nous sommes en Angleterre, à la fin du XVIIIe siècle. Lady Susan est une veuve à la beauté ravageuse. Mais sous sa plastique avantageuse d’apparence lisse, se cache en réalité une femme bien plus complexe, prête à tout pour se retrouver un mari ainsi que le gendre parfait pour sa jeune fille.

Comme pouvait le laisser présager le pitch, cette adaptation d’une œuvre que Jane Austen avait refusé de publier sera bien moins niaise et mielleuse que ce dont à quoi l’écrivaine avait pu nous habituer. Car plus que les sentiments amoureux, ce sont sur les différentes manipulations et manigances que va se focaliser le scénario. Satire intellectuelle sans être élitiste, le métrage est une pépite malicieuse et subtile, un tableau acerbe d’un monde où l’hypocrisie et reine. Mais "Love & Friendship" ne serait pas aussi délicieux sans cette reconstitution parfaite de la Cour anglaise, avec le faste et les extravagances de l’époque.

Néanmoins, malgré les qualités scénaristiques et des dialogues incroyablement bien retranscrits (difficile de prendre le texte de Jane Austen sans que celui-ci ne sonne comme complètement faux ou risible), le film souffre de nombreuses longueurs et d’une théâtralité un peu trop exacerbée. En limitant la plupart des scènes à un cadre fermé (unité de lieu, peu de déplacements), Whit Stillman atténue l’efficacité de son récit, s’inscrivant progressivement dans un rythme nonchalant. Heureusement, la prestation impressionnante de Kate Beckinsale (oui, oui, l’actrice de la saga "Underwold") emporte tout sur son passage, nous faisant oublier tous les défauts du métrage par un simple regard mutin. Notre seul regret, c’est que Whit Stillman se fasse si rare, car l’homme a définitivement beaucoup de choses à raconter.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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