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LA DAMNÉE

Un film de Abel Danan

Où confinée ne rime pas avec tranquillité

Yara débarque fin 2019 à Paris depuis son Maroc natal pour faire ses études de psychologie. S’acclimater à Paris est déjà assez difficile en soi, mais si on doit composer avec une famille inquiète à l’autre bout du fil, un confinement, et des phénomènes étranges, il y a de quoi perdre la tête…

S’il y a bien une période récente qui nous a marqué collectivement tant elle nous a confronté à nous-même et à nos limites, c’est la pandémie de 2020. Déjà si lointaine et si proche à la fois, elle est encore vivace pour tout le monde. C’est la toile de fond qu’a choisi Abel Danan pour son premier long-métrage. Déjà remarqué au Festival de Gérardmer en 2021 avec le court-métrage "Canine" (aussi co-écrit avec Emma Lacoste qu’il retrouve sur "La Damnée"), il utilisait alors le genre du film de vampire pour explorer les points de bascule de la psyché.

Inspiré des histoires et du folklore marocain qui a bercé l’enfance du réalisateur, le film qu’il nous présente garde aussi cet ancrage fort sur l’exploration de la psyché : jusqu’à quel point peut-on vivre avec ses traumas en se disant que « tout va bien » ? Est-ce que nos proches, aussi bien intentionnés soient-ils, ne sont pas toujours un peu maladroits lorsqu’il s’agit de nous aider à faire face ? Qu’est-ce qui nous fait disjoncter ? Pour appuyer son propos et rendre inéluctables ces questionnements pour sa protagoniste principale, il l’enferme et nous enferme avec elle dans un petit appartement parisien, qu’elle décrit comme « magnifique », et qu’on voit tel qu’il est : miteux et déprimant.

L’ambiance appuie peu à peu le glissement de la rationalité de Yara : la lumière verdit, l'appartement s’encombre, le néon de la cuisine se met à clignoter, car il lâche et elle aussi. Toute la première partie du film est très maline et portée sur un questionnement : est-ce qu’elle est folle, ou est-ce qu’il se passe vraiment quelque chose d’étrange dans cet appartement ? Et on y croit, car Lina El Arabi incarne une Yara authentique et intense, dans les hauts comme dans les bas.

On regrette un peu que la seconde partie du film ne nous laisse pas le loisir de douter encore. Mais l’exercice est réussi : il y a là des scènes d’angoisse ou de violence, et il y a aussi là, la routine et le vide de la solitude forcée, ce qui rend toute interaction, néfaste ou non, plus intense. Vous n’avez plus qu’à attendre le mois d’octobre pour pouvoir découvrir ce film sur grand écran.

Océane CachatEnvoyer un message au rédacteur

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