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L'ENVOL

Un film de Pietro Marcello

Une émancipation onirique à la mise en scène soignée

Après la première guerre mondiale, Raphaël retourne chez lui, enfin plus précisément chez Madame Adeline qui lui présente son enfant née avant que sa femme ne décède. Mais dans le village, tout le monde regarde le soldat rescapé étrangement. Les villageois semblent au courant de quelque chose…

L'envol film movie

Les premières images interpellent. Silencieuses après un générique aux sonorités minimales, on voit un groupe se déplacer. L’époque n’est pas précisée, le grain de l’image est très appuyé. Doucement, la caméra se focalise sur une gueule cassée, un rescapé de la Grande Guerre, boiteux et à l’œil blessé. Raphaël retourne dans son village, retrouver les vestiges de sa vie d’antan. Car alors qu’il était sur le front, sa femme est décédée, l’obligeant à trouver refuge chez Madame Adeline dont la ferme tombe en ruines. Elle lui présente sa fille, née avant le décès de sa mère, donnant au bourru combattant un nouvel espoir, une autre mission à mener. Celui qui a « de l’or dans les mains » va, au-delà d’aider son hôte à remettre en ordre la demeure, chercher par tous les moyens à trouver un emploi d’ébéniste. Mais l’exercice s’avère plus délicat que prévu, les regards portés sur lui n’inspirent pas la bienveillance. Dans ce climat anxiogène, celui-ci semble être la marionnette d’une farce qui ne dit pas son nom.

De cette chronique sociale et psychologique, le drame va évoluer vers une ambiance plus fantasmagorique au fur et à mesure que la translation de héros s’opère entre le père et la fille. Débute alors un autre métrage, une exploration originale d’un folklore français rarement capturé à l’écran (le film est en réalité une adaptation libre des "Voiles écarlates" d’Aleksandr Grin, transposée dans le Nord de l’hexagone). Au cœur de ce conte en partie musical, la révélation Juliette Jouan subjugue la pellicule, rappelant par ses expressions et sa manière de jouer Adèle Haenel. Si certaines insertions sont moins réussies (notamment le personnage de Yolande Moreau), "L’Envol" n’en demeure pas moins un film étonnant et détonnant, un récit d’émancipation résolument féministe enveloppé dans un esthétisme admirable, nous faisant rapidement oublier les quelques défauts qui peuvent peupler l’intrigue. Et cette naïveté, d’apparence difficilement crédible au cinéma, de se transformer en une fable moderne et politique.

Christophe BrangéEnvoyer un message au rédacteur

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