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INTERCEPTED

Un film de Oksana Karpovych

La disparition de l’humanité

En Ukraine, les conséquences de la guerre menée par la Russie depuis février 2022 se font sentir partout, dans les paysages ruraux comme urbains, comme dans la vie quotidienne des gens qui sont restés. Ces images de sont mises en relation avec des conversations, interceptées entre des soldats russes et leurs proches (mère ou femme) qui montrent la haine rampante de l’autre, le mépris de la vie, et surtout la progression de la barbarie dans le comportement de certains soldats…

Le dispositif aurait pu être trop systématique. Pourtant il n’en est rien et la superposition de conversations entre des soldats russes et leurs proches, avec des images de routes dégradées, d’immeubles ou appartements éventrés, de sous-sols dans lesquels on survit, fait froid dans le dos. Non seulement parce que les mots décrivent des horreurs, comme des méthodes de torture ou la découverte de la jouissance dans la violence et le fait de donner la mort, mais surtout parce qu’au delà des images, ils retranscrivent la volonté d’éradiquer un peuple, auquel on dénie souvent la qualité d'êtres humains, surnommés les Khokhols ou les cafards, le terme PD revenant aussi comme l’une des insultes suprême et basse du front.

C’est finalement dans les mots de certaines mères que l’inhumanité d’une partie de la population russe, conditionnée par la propagande d’Etat, se fait jour. Racisme, mépris de la vie, désir d’une vengeance irrationnelle et surtout jalousie d’une meilleure situation économique que la leur, la plupart des coups de fil achèvent de décrire des familles pour une partie d'entre elles, confondant patriotisme et haine aveugle. Au milieu de cela apparaissent aussi quelques réflexions de soldats ou de femmes lassés par les mensonges sur l’avancée des troupes, se révoltant contre les viols faits aux populations civiles, ou inquiètes pour les emplois et une possible future dépendance à la Chine. En filigrane apparaissent le traitement réservé aux quelques 200 000 fuyard, l'enrôlement par l'argent ou forcé, et des nouvelles des blessés ou des morts. Un documnetaire nécessaire en forme d'état des lieux d'une pensée nauséabonde, mais porteuse d'espoir par la vie qui persiste au milieu des ruines, et quelques bribes de raisonnements rassurants.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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