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INSECTICIDE, MON AMOUR

Une enquête alerte et précise

Originaire de Haute-Savoie, Guillaume Bodin est ouvrier viticole en Saône-et-Loire. Lorsqu’il se retrouve victime des dommages collatéraux des traitements aux insecticides imposés pour lutter contre la cicadelle de la flavescence dorée, il prend sa caméra et se lance dans une enquête autour de ce phénomène. Son investigation va mettre en avant un constat accablant

D’emblée, en raison de sa courte durée (52 min !) et d’une mise en scène qui se limitera grosso modo à une suite d’interviews, il semble posé qu’analyser le second documentaire de Guillaume Bodin ne sera pas à faire par le versant cinématographique. On aura beau trouver de jolies parenthèses élégiaques (notons de très jolis plans d’insectes à la "Microcosmos") ou se laisser porter par un montage en fin de compte assez musical, le relief cinégénique du résultat s’avère plus que limité. Il ne reste donc que le fond du sujet sur quoi se pencher, et là-dessus, on peut clairement se réjouir de suivre une vraie investigation, joliment menée et bien structurée, qui condense en à peine cinquante minutes un grand nombre d’informations, de constats et de réflexions scientifiques, le tout avec une vraie lisibilité et un langage commun très accessible aux néophytes. Et les constats imposés par cette enquête sur l’effet des pesticides sur les vignes sont accablants en plus de se propager vers de plus larges espaces.

Un insecticide qui détruit non seulement l’insecte indésirable mais aussi le sol (qui n’est plus oxygéné ni peuplé de matière organique) et qui cause des répercussions terribles sur tout ce qui compose l’habitat familial (nourriture, mobilier, textiles, plantes…) ; une peur déraisonnée de l’insecte qui aboutit à un arrêté départemental voué à déresponsabiliser les viticulteurs (et donc à détruire le lien sacré et artisanal entre eux et leurs vignes) ; et une population locale menacée de diverses maladies en cas de contact avec ces produits chimiques (le témoignage d’un contaminé vaut ici son pesant d’or). Tout au long d’un va-et-vient permanent entre le passé (des documents d’archive révélant l’action de l’insecticide) et le présent (des interviews qui mettent en avant sa nocivité), Guillaume Bodin laisse le débat s’infuser dans la tête d’un spectateur encouragé à réagir et à s’informer, quitte à ce que le futur soit moins vecteur de craintes que de responsabilités. Pour un peu, on en oublierait presque cette chanson engagée à la Francis Lalanne qui vient hélas polluer lourdement le générique de fin.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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