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HOKUSAI

Un film de Hajime Hashimoto

Du sous-Kobayashi en mode EuropaCorp

Dans le Japon du XVIIIè siècle, le pouvoir impérial impose sa censure sur les artistes. Mais certains résistent, dont le jeune Shunrô, apprenti peintre exclu de son école à cause d’un tempérament difficile et d’estampes au style peu conventionnel. Personne ne se doute alors qu’il deviendra ensuite le célèbre Hokusai Katsushika, auteur du tableau « La Grande Vague de Kanagawa »…

Hokuzai film movie

Seulement 1h30 pour le biopic d’un artiste aussi fondamental qu’Hokusai ? Deux options possibles : soit le réalisateur Hajime Hashimoto allait se focaliser sur une courte partie de la vie de son sujet, soit le scénario allait se retrouver le plus compressé possible pour tout faire tenir sur une durée réduite. De façon très étrange, le résultat tient du claquage entre les deux options précitées. Alternant entre deux âges de la vie d’Hokusai (jeune et vieux), le film commet surtout la grave erreur d’appliquer le même traitement expéditif à chacune de ses séquences. Pour être plus précis, lorsqu’une scène du film doit exprimer quelque chose (que ce soit par le dialogue ou par le découpage), elle doit s’achever une fois l’intention concrétisée, histoire de ne pas perdre de temps et de passer fissa à la scène suivante. D’où un montage proche du zapping compulsif, dont on se demande parfois si son responsable a été autrefois biberonné aux usines EuropaCorp. Trop rapide, trop compressé, trop succinct, surtout trop sec dans ses raccords de plans pour ne pas nous laisser à penser qu’il devait durer le double au départ (on perçoit les signes d’une postproduction faite à l’arrache), "Hokusai" n’arrive jamais à déployer la puissance contemplative et immersive qui devait accompagner son sujet.

Avec ce très gros défaut dans l’équation, le sort du film est scellé. Le propos sur l’inspiration immédiate et anti-conventionnelle de l’artiste, les beaux efforts du chef opérateur et du décorateur, la discrète sophistication des cadres et des travellings, le talent des jeunes acteurs (dont le revenant Yûya Yagira, jeune acteur récompensé à Cannes en 2004 pour "Nobody Knows" de Kore-Eda qui embrasse ici le rôle de Hokusai jeune), la captation précise de l’acte de création artistique (joli montage qui décrit la création minutieuse de « La Grande Vague de Kanagawa »)… Tout ce qui devait servir de base à une grande œuvre délicate et infrasensible se résume à des cases à cocher sur une liste jusqu’au générique de fin. La scène finale, de très loin la plus belle et la plus forte d’un point de vue purement esthétique et sensitif, incarne à elle seule ce que tout le film aurait pu être. Mais là encore, les plans sont beaucoup trop courts et on ne profite pas assez des images ni du rythme lancinant de son atmosphère. Ni digne successeur des œuvres picturales de Masaki Kobayashi ni ersatz de "La Belle Noiseuse" en kimono, "Hokusai" nous laisse dans un état de frustration avancée. On peut clairement parler de gâchis.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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