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HIPPOCRATE

Un film de Thomas Lilti

Au secours, il y a urgences !

Benjamin, comme son prénom l’indique, est le petit dernier recruté dans un grand hôpital parisien. Il est dans le même service que son père et est arrivé en même temps qu’Abdel, un médecin algérien qui doit faire ses preuves pour pouvoir travailler en France. Mais alors qu’Abdel se révèle extrêmement doué, Benjamin commence pour sa part à douter de ses capacités…

L’hôpital est rarement le théâtre de films cinématographiques. Les instituts psychiatriques ont davantage inspiré les scénaristes qui aiment explorer la folie des patients en se demandant au final si les plus fous ne sont pas ceux qui sont dehors ! En France, l’hosto est surtout le lieu de comédies (celle à venir "Bon rétablissement" avec Gérard Lanvin, l’oubliable "Bowling" avec Catherine Frot ou le déjanté "La Clinique de l’amour" avec le regretté Arthus de Penguern), voire de films noirs (comme l’étrange "Qui a tué Bambi ?" de Gilles Marchand). C’est le mélange des deux qui intéresse Thomas Lilti avec "Hippocrate", son deuxième long-métrage (après "Les Yeux bandés") qui dose savamment l’humour dans la première partie avant d’administrer une certaine mesure de drame puis de film social.

Les personnages principaux du film de Thomas Lilti sont deux nouveaux internes que tout oppose : le jeune, nouveau diplômé, « fils de », qui se croit à l’abri, pépère ; face à l’expérimenté, immigré en situation délicate, qui doit constamment faire ses preuves et n’a donc pas droit à l’erreur. Le film joue sur ces codes que le cinéma adore exploiter et pointe en même temps un déséquilibre flagrant de situation que le réalisateur – lui-même médecin encore en exercice – a réellement connu.

Le film alterne donc constamment entre comédie et sérieux, et pas seulement parce que les deux comédiens principaux incarnent à eux seuls chacun des deux registres : Vincent Lacoste côté humour et Reda Kateb côté sérieux. Et Lilti, en explorant les coulisses de l’hôpital – presque façon documentaire – livre parallèlement deux facettes de ces lieux : les moments heureux et une face beaucoup plus sombre. Dans la première catégorie, le film se fait plaisir dans la joie des fêtes entre personnels soignants et internes (où la picole coule à flot), dans la taquinerie de la roue des gages, ainsi que dans l’ambiance boute-en-train du réfectoire.

Dans la seconde, nos « héros » font face aux erreurs médicales, au choc du premier cadavre, aux petits mensonges aux familles de patients, aux petits arrangements avec les morts et les confrères, aux patients en fin de vie et dans un registre plus social, aux manques de moyens et à la rentabilité qui passe avant tout (oui l’hôpital est une entreprise comme une autre)… Le spectateur bascule ainsi du fou rire à l’émotion. Les comédiens, Lacoste et Kateb en tête, s’en donnent à cœur joie en jouant sur les deux tableaux, et on regrettera seulement que leurs personnages soignés ne soient pas accompagnés de seconds rôles tout aussi intéressants et moins caricaturaux.

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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