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GREENHOUSE

Un film de Lee Soi-hui

Mélange des genres en demi-teinte

Moon-jung est aide-soignante à domicile et s’occupe actuellement d’un vieux couple. L’homme est aveugle et bienveillant, l’épouse est mutique et atteinte de démence paranoïaque. Le jour où cette dernière décède accidentellement à la suite d’une agression, Moon-jung, se sachant susceptible d’être accusée d’homicide involontaire, prend une décision terrible…

D’aucuns auront beau citer la jeune réalisatrice Lee Soi-hui comme nouvelle venue parmi la A-List des cinéastes coréens (citons Park Chan-wook, Bong Joon-ho ou Lee Chang-dong), "Greenhouse" prouve surtout que le chemin est encore long pour la voir égaler le niveau de ses aînés. Cela dit, on se positionne d’entrée en terrain connu : par le biais de cette intrigue mélodramatique mettant en avant aussi bien un terrible secret à « garder sous le tapis » qu’un système sociétal se désintéressant de ses classes sociales les plus fragiles (ici les retraités et les aliénés), c’est encore une fois le visage ambivalent d’une société coréenne prétendument tournée vers l’avenir qui éclate au grand jour. Chaque personnage de "Greenhouse", d’une héroïne au quotidien morne à un couple de retraités conflictuel en passant par une mythomane pot-de-colle, suffit à dessiner le visage d’une société gorgée de frustrations multiples, de désirs inassouvis et de ténèbres vertigineuses, du genre à promettre un thriller traduisant une vision sombre et désespérée de la condition humaine. Hélas, la mécanique à l’œuvre se grippe trop vite pour cause de fièvre qui ne monte jamais.

Pour tout dire, l’intenable faiblesse de ce film vient autant de sa mise en scène (basique et fonctionnelle à souhait) que de son écriture, délestée de toute propension au puzzle narratif et manipulateur au profit d’une linéarité plus erratique qu’autre chose. La réalisatrice a beau privilégier une forme bienvenue de psychologie tortueuse au travers de quelques échanges à la tension feutrée, voire même charger de temps en temps la mule sur la fragilité des uns et des autres, tout ceci ne fait qu’appuyer la logique fataliste d’un récit qui fait de la fin de vie moins une toile de fond universelle qu’un enjeu de suspense pataud, misérabiliste, dépourvu d’émotion, et d’ailleurs pas toujours des plus subtils vis-à-vis de notre suspension d’incrédulité – la plausibilité de certaines scènes reste assez difficile à avaler. À tel point que le quart d’heure final, lequel précipite soudain la terrible logique de l’engrenage par le biais d’un double quiproquo morbide, réussit presque malgré lui à transformer une scène effroyable en burlesque involontaire. Et si, au fond, la meilleure option pour un tel scénario avait été de tout miser sur l’humour noir ?

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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