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GEMMA BOVERY

Un film de Anne Fontaine

Flaubert revisité

Pour fuir le stress Parisien, Martin est revenu dans sa Normandie natale pour devenir boulanger. Passionné de littérature, il est interpellé par l’arrivée dans le voisinage, d’un couple d’anglais se nommant Bovery et dont l’épouse porte le prénom de Gemma. Très vite, il va sympathiser avec la jeune femme en qui il voit une réincarnation d’Emma Bovary…

Adapté d’un roman illustré de Posy Simmonds, lui-même librement inspiré d’un des plus grands romans de la littérature française, "Gemma Bovery" offre une séduisante mise en abîme de l’œuvre de Flaubert. Comme Madame Bovary, son héroïne oscille entre rêve et désillusions, telle une âme romantique prise au piège du quotidien. Cette évocation prend forme dans l’imagination de Martin, un voisin amoureux des belles lettres qui, séduit par cette coïncidence homonymique, se révèle narrateur de la destiné de cette jeune anglaise esseulée dans la campagne normande. Un tant soit peu émoustillé par les charmes de la jeune femme, notre homme se passionnera pour Gemma au point d’interférer dans sa vie afin qu’elle devienne une véritable héroïne de Flaubert.

« Il ne se passe rien, mais en même temps on s’intéresse » dit maladroitement Gemma avec son petit accent britannique, au sujet du roman original que Martin lui a prêté. C’est exactement le sentiment que l’on ressent à la vision du film d’Anne Fontaine, du moins dans sa plus grande partie. Élégant et indolent, le scénario se déroule langoureusement, épousant au mieux l’œuvre auquel il fait référence. De temps en temps, la réalisatrice égratigne la haute bourgeoisie franco-anglaise en dressant un portrait acide des notables d’une région prisée pour son patrimoine autant gastronomique qu’immobilier. Cette caricature parfois trop appuyée par le personnage odieusement arrogant interprétée par Elsa Zilberstein, tranche avec la douceur de Gemma pourtant en proie aux troubles affectifs et pécuniaires.

Véritable ode à la littérature, le film distille ça et là quelques clins d’œil aux grands auteurs du romantisme tourmenté. Pour exemple, le fils de Martin, présenté initialement comme inculte, se met à lire Premier amour de Tourgueniev qui relate la détresse du jeune Vladimir qui surprend son père dans les bras de la voisine dont il est amoureux. Le film s’écoule ainsi, esthète et raffiné, jusqu’à l’heure du dénouement, qui lui, réserve bien des surprises. En effet, toute l’originalité du scénario se dévoile dans les dix dernières minutes, élevant le film dans un tout autre registre que celui de la simple transposition d’un roman du XIXe au XXIe siècle. Une belle façon de réviser ses classiques ou de les découvrir, tout simplement.

Gaëlle BouchéEnvoyer un message au rédacteur

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