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COUP DE CHAUD

Un film de Raphaël Jacoulot

Bouc émissaire

Dans un village rural, alors que la sécheresse menace, les agriculteurs s'organisent pour acheter une nouvelle pompe permettant de puiser dans l'eau de l'étang. Sous la chaleur accablante, Josef Bousou, jeune homme agité, connu pour chaparder ça et là, commence à exaspérer une partie des villageois...

Il est évident que mettre en scène un scénario sur la différence et l'exclusion tournant au harcèlement, n'est pas chose aisée. Raphaël Jacoulot s'y est essayé avec "Coup de chaud", adapté d'un fait divers, et mettant un petit village rural aux prises avec les agissements d'un fils de ferrailleur aux origines gitanes, dont le comportement provocateur et limite asocial font craindre un réel dérapage.

Portrait d'un groupe subissant de plein fouet une crise (la sécheresse) et cherchant un coupable, le film est aussi celui d'une communauté dérangée par la figure de l'autre quand celui-ci ne rentre pas dans la norme. Ainsi le nouvel artisan, fraîchement installé (Grégory, découvert dans « Angèle et Tony ») mais croulant sous les dettes, est bien moins inquiétant que celui qui vit depuis longtemps dans le village et cherche à avoir la même chose que les autres (une petite copine, des potes, un métier...), tout en agissant de manière souvent inconsciente.

Malheureusement le scénario, co-signé avec Lise Macheboeuf, joue de manière trop visible sur tous les tableaux et l'on a au final la désagréable sensation de s'être faits manipuler. Raphaël Jacoulot organise une carence d'informations sur certains personnages (autres que Josef) qui vise délibérément à nous positionner du côté des persécuteurs, avant de révéler sur la fin certains détails qui font basculer le regard. Cependant, elle en donne jamais la possibilité de soupçonner un autre (en serait-ce que pour le vol de la pompe...).

Loin de la finesse du film “La chasse” de Thomas Vinterberg, “Coup de chaud” manque d'un véritable approfondissement de chaque personnage. Si la pathologie du personnage principal est visiblement connue localement, elle n'excuse en rien les agissements des autres, mais mérite cependant une surveillance dont il n'est pratiquement pas question ici, le rôle des parents n'étant jamais questionné ici.

Reste la qualité du casting. Loin de l'ambiguïté soulevée par le personnage joué alors par Mads Mikkelsen dans “La Chasse”, le jeune Karim Leklou (« Les Géants », « Bébé tigre ») ne s'en tire pas si mal, générant une réelle inquiétude. Jean-Pierre Darroussin fait bonne figure dans un rôle un peu cliché de maire rural compatissant et soucieux avant tout de la paix sociale. Carole Franck est tout juste fabuleuse en agricultrice au bord de la crise de nerfs. Quant à Grégory Gadebois, il faut bien avouer que son imposante stature et le tiraillement de son personnage entre sa gentillesse et des responsabilités qui le dépassent, ne sont pas suffisamment exploitées.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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