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CAVALIERS SEULS

Une noble forme de survie

Marc, champion international de saut d’obstacles, séducteur inlassable et intransigeant, occupe aujourd’hui du haut de son fauteuil électrique, un box d’écurie aménagé en minuscule deux pièces… Sa survie ne tient qu’à quelques fils : entendre de l’autre côté de la cloison le cheval voisin se coucher dans la paille à la nuit tombée, attendre le jour et l’arrivée de Martine, auxiliaire de vie et exquise pousse-au-crime, puis celle du jeune Edmond, 18 ans, cavalier d’une grâce inouïe, dont la prestance n’a d’égale que l’économie de parole…

Si le film, sans aucun doute, ravira les amateurs d’équitation, il faut bien préciser que c’est avant tout un documentaire sur un homme, et non sur les animaux qui représentent sa passion. Cet homme, nous le suivons dans son quotidien qui consiste en une répétition infinie de gestes simples. Manger une orange, regarder un vieux film à la télé, prodiguer un conseil précieux à son poulain, enfiler ses prothèses, faire quelques pas avec le déambulateur, regarder ses chevaux avec admiration, regarder une jolie fille avec délectation, regarder le passé avec nostalgie.

Dès les premières minutes, le film est doté d’un rythme très lent, on sent l’ennui qui arrive, inéluctablement. Mais rapidement on se rend compte que la faute est peut-être à mettre sur le compte du spectateur. Nous, citadins stressés et hyperactifs, ne sommes pas toujours habitués à autant de silence et de calme, nous n’acceptons pas facilement que les choses n’avancent pas. Ici c’est donc au spectateur, s’il accepte cette démarche, de se mettre au rythme de Marc et d’être le témoin discret de quelques instants aussi intimes qu’anodins.

Et à la fin, quel est le message à retenir ? Nous voyons un homme qui a su continuer à vivre après avoir perdu l’usage de ses jambes. A défaut de vivre sa passion, il a su la transmettre, noble forme de survie. C’est évidemment une belle leçon de courage. Et malgré l’immobilité du récit, malgré l’impression qu’il ne se passe pas grand chose, quand la caméra parvient à saisir le regard qu’un homme porte sur sa propre vie, n’est-ce pas un événement qui vaut le déplacement ?

Rémi GeoffroyEnvoyer un message au rédacteur

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