Bannière Reflets du cinéma Ibérique et latino américain 2024

AVANT QU’IL NE SOIT TROP TARD

Un film de Laurent Dussaux

Presque un sitcom sur grand écran, avec son énorme lot de clichés

Un an après le mariage de Gérard et Solange, et le tragique accident qui avait coûté la vie à leur ami Ben et handicapé Clarisse, une bande de trentenaires se retrouve dans le chalet plein de souvenirs d’Aurélia, avant que celle-ci ne le vende. Phyl arrive avec la bonne intention de se suicider après, rien ne va plus pour les couples, la réputation d’Aurélia se dégrade, de vieux secrets éclatent…

La séquence pré-générique sonne déjà très faux : en à peine 5 minutes, on ne croit déjà plus en l’authenticité des personnages, bien que le scénariste se soit inspiré de sa propre histoire (preuve que la notion de "basé sur une histoire vraie", même si elle n’est pas mentionnée au générique, n’est pas un gage de qualité). On sent le film-pagaille cul-cul par excellence. Le générique redonne espoir avec un magnifique plan-séquence hélico d’une montagne où les noms s’affichent avec fluidité en se reflétant dans la rivière, sur fond de musique mélancolique ("Again" de Archive). On se met alors à espérer qu’une once de style pourra compenser les mauvaises impressions du début.

Peine perdue dès la fin du générique où un motard poste des lettres, avec la voix off de Frédéric Diefenthal (censé être sous le casque) décrivant le contenu des lettres : « Mes chers amis, quand vous lirez cette lettre, je serai mort. Si je viens ce soir, c’est pour vous voir tous une dernière fois et vérifier que vous êtes heureux ». Ca pue le conformisme et le manque d’inspiration à plein nez… et ça ne fait que commencer ! La suite n’est qu’une errance pseudo-métaphysico-romantique au fil d’une de ces soirées glauques où tout le monde ne pense qu’à se bourrer la gueule et fumer on-ne-sait-quoi afin de fuir la morosité de leur vie et de leur entourage.

La fuite en avant des personnages est aussi inexorable que la descente aux enfers du film, et vice-versa. Les personnages de Titi et Grégory, respectivement acteur et réalisateur d’une sitcom, semblent contaminer le reste des personnages et de l’intrigue. Les dialogues quasi sitcomesques s’enchaînent (le scénariste n’est autre que le créateur du feuilleton « Une famille formidable » dont le film se rapproche énormément !) avec leur lot d’humour grotesque pseudo-intelligent (« le sperme, elle le boit en canettes »), de poésie à deux balles (« un cœur ça bande pas donc on sait jamais si c’est réciproque »), de psychologie à la mord-moi-l’nœud (« C’est parce qu’on n’a jamais été amis qu’on n’a pas pu s’aimer ; je me disais que maintenant qu’on ne s’aime plus, on pourrait peut-être essayer d’être amis » !!!) ou encore de beaufitude enfantine extrême (« On fait quoi, un baby ou un action-vérité ? Bon de toute façon, je m’en fous, j’en ai marre, je me casse »). Mmmh… on dirait qu’on a proposé un sujet de rédaction à des élèves de 4 ème pour avoir la base du scénario !

A part ça, les acteurs, même s’ils semblent s’être bien amusés (encore un film plus marrant à faire qu’à voir !), ne sont pas crédibles pour un sou. L’émotion ne passe que très rarement et le jeu n’est qu’épisodiquement satisfaisant (Dequenne et Montoute s’en sortent le mieux parmi les rôles principaux, Lisa Martino et Vanessa Larré pour les rôles plus secondaires). Tout est prévisible à 50 km à la ronde, les séquences et les personnages passent leur temps à enfoncer des portes ouvertes et à exploiter les plus téléphonées des situations, le réalisateur ne parvenant pas à trouver un équilibre entre comédie et drame. Bref il n’y a pas grand-chose à sauver dans ce film qui aurait peut-être gagné à être adapté à la télé pour atteindre son public-type : quelques répliques par-ci par-là, quelques regards, une BO sympatique (Syd Matters, Rita Mitsouko, Hawksley Workman…), le générique de début… Pas de quoi sauter au plafond !

Raphaël JullienEnvoyer un message au rédacteur

À LIRE ÉGALEMENT

Laisser un commentaire