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99 MOONS

Un film de Jan Gassmann

Relation toxique pour personnages attachants

Jeune femme proche de la trentaine, Bigna, chercheuse, se rend en voiture dans un parking, où un homme portant un masque de hockey tente de la violer. Mais l’affrontement vire en faveur de la femme, qui termine le sexe sur le visage de cet homme, finissant lui-même en pleurs. À partir de ce viol simulé, commence la relation entre Bigna et Frank, âgé lui de 33 ans, alors qu’elle avait pourtant juré qu’elle ne ferait aucune exception à sa règle : jamais deux fois avec le même mec…

99 Moons film movie

A Cannes cette année des histoires de relations toxiques figurent dans plusieurs sections. "99 Moons" en fait partie, du côté de la section Acid, avec l’histoire tourmentée de Bigna et Frank, chacun cherchant quelque chose de différent dans leurs rencontres, et Bigna ayant développé des obsessions sexuelles où la violence a une part importante. L’un des intérêts du film est justement d’avoir a priori inversé le rapport de force, faisant du personnage féminin celui obsédé par une certaine forme de domination, passant par le contrôle des scénarios fantasmés qu’elle concocte (dont la fausse agression initiale) et du personnage masculin la fibre sensible, recherchant lui un contact véritable.

Symbolisant la force des moments de connexion entre ces deux êtres par de soudains tremblements du décor et de la caméra, à l’image de ceux qui provoquent les tsunamis que Bigna tente de prédire dans son travail en étudiant l’activité des chèvres autour de volcans, Jan Gassmann parvient à nous faire aimer ses personnages, pourtant plongés dans une histoire plutôt tordue. Jouant avec l’image du dominant mais aussi avec la notion d’underground (Frank est DJ dans une mystérieuse boite de nuit à laquelle on accède par un faux frigo...), sa mise en scène maintient une belle tension, utilisant les nombres de lunes à chaque ellipse temporelle, marquant ainsi les va-et-vient d’un être vers l’autre, et soulignant l’attraction irrésistible des corps. Il manie à la fois les couleurs, rendant soudain plus lumineuses certaines scènes de sexe (dans la cuisine par exemple), mais aussi les flous, parsemant de petites touches symbolique un récit fait d’hésitations et d’élans.

Quand Frank tente d’attraper des poissons, ceux-ci lui échappent des mains (un peu comme elle…). Quand Bigna travaille, elle est dans une sorte de salle de contrôle. Entre des sauts dans le temps irréguliers (parfois 1/7ème de lune, parfois 22 lunes…), la nature de leur lien s’esquisse, malgré les réticences affichées par chacun à perdre un peu de sa liberté. Mais quand il s’agira de prendre des décisions, de partir travailler au Chili ou de s’unir légalement, les difficultés se feront à nouveau jour, laissant à nouveau la tendresse sur le carreau. De tendresse et d’attachement, tout autant que de vibrations à l’unisson, il est pourtant question ici, derrière cette mise en scène efficace et deux personnages difficiles à apprivoiser au premier abord.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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