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PARVANA

Un film de Nora Twomey

Une question de survie

À Kaboul (Afghanistan), sous le régime taliban, Parvana, jeune fille de onze ans, se rend régulièrement au marché avec son père. Mais un jour, à la suite d’une altercation, celui-ci est arrêté comme « ennemi de l’islam » et mis en prison, laissant sa famille sans nouvelles. Afin de pouvoir sortir seule et ramener de la nourriture pour sa famille, elle doit se faire passer pour un garçon. Commence alors un dangereux parcours quotidien durant lequel elle ne perdra jamais de vue l’un de ses objectifs : revoir son père et le faire libérer…

Depuis la fin de l’année dernière, le film d’animation "Parvana, une enfance en Afghanistan" ("The Breadwinner" en anglais) a eu le temps de se construire une réputation avant de sortir enfin en France en cette fin juin. Nommé à l'Oscar du meilleur film d'animation 2017, passé par le Festival d’Annecy (où il a remporté à la fois le Prix du Public et le Prix du jury), cette chronique d’une jeunesse féminine sous le régime des talibans aura donc débarqué sur les écrans avec de nombreux atouts, dont la présence pour le doublage français de l'actrice iranienne installée en France, Golshifteh Farahani (récemment rôle principal dans "Les Filles du soleil" présenté à Cannes).

Avec un sujet social et politique fort, sur la condition des femmes et le règne par la terreur et l'arbitraire, le film fait preuve d’une réelle capacité à montrer l'absurdité des règles du régime taliban, obligeant les jeunes filles à se transformer en hommes pour pouvoir disposer d’un minimum de liberté. La première partie du métrage est d’ailleurs consacrée à la description de la situation de détresse dans laquelle plonge la famille de Parvana, privée de figure masculine, et donc interdite de vente au marché, de travail, de sortie sans homme accompagnateur, en bref de la moindre existence sociale. Le fonctionnement de la cellule familiale s’en trouve ainsi impossible, entre mère molestée, grande sœur isolée et petit frère encore trop dans l’incompréhension de la situation.

Si plane également l’ombre d’un grand frère absent dont on refuse de parler, le scénario s’évertue avec finesse à montrer le machisme et la corruption ambiants, ainsi que la prolifération des profiteurs de guerre, tout comme l’utopie du mariage et de la fuite. Dotée d’un savoir-faire graphique incontestable, Nora Twomey, qui a notamment coréalisé "Brendan et le Secret de Kells" et travaillé sur "Le Chant de la mer", alterne entre deux techniques pour représenter réalité et passages contés. Ainsi le conte, témoignage d’une tradition orale et traduction d’un espoir chevillé aux corps, se distingue de l’animation traditionnelle du reste du film, par l’utilisation de la technique du papier découpé et un travail sur les formes géométriques. Une raison supplémentaire pour emmener petits et grands voir "Parvana".

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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