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BIUTIFUL

Avertissement : chef d’œuvre en puissance

A Barcelone, de nos jours, Uxbal (Javier Bardem) est un père aimant qui vit de petits boulots pour la plupart malhonnêtes. Il n’a jamais connu son père, ce dernier étant mort en Amérique du Sud après avoir fui le régime de Franco. Son ex-femme (Maricel Alvarez), maniaco-dépressive, est devenue un poids pour lui alors qu’elle tente vainement de se sortir d’affaire. Un jour, la mort vient rôder tout près de lui…

« Amours chiennes », « 21 grammes », « Babel »… Si vous avez aimé voire adoré les trois précédents films d’Iñárritu, n’hésitez plus, courrez voir « Biutiful », le quatrième long-métrage du réalisateur mexicain. Première nouveauté dans sa filmographie, Iñárritu abandonne le film choral pour se concentrer sur un personnage central autour duquel gravite une pléiade d’autres protagonistes. Deuxième nouveauté, son casting est totalement inédit avec l’un des meilleurs acteurs du moment, Javier Bardem qui se fond dans l’univers d’Iñárritu avec une telle aisance qu’on en vient à se demander pourquoi ces deux-là n’avaient pas encore travaillé ensemble. Dernière nouveauté: une histoire linéaire et enfin, un lieu unique où tout va se jouer, Barcelone, comme on a peu l’occasion de la voir à l’écran.

Mis à part cela, tout Iñárritu est concentré dans ce nouveau film. Des hommes et des femmes torturés, l’horreur de la clandestinité, un soupçon de mystique, diverses nationalités qui se croisent, des enfants et des âmes à sauver… On retrouve les thèmes chers au réalisateur, ceci dans un contexte espagnol inédit : la paternité, la peur de la mort, la multi-culturalité…

Ce qui prime dans cette œuvre délicate, souvent sombre, mais à la fois lumineuse, c’est l’émotion. Les histoires de chaque personnage, mais celle d’Uxbal en particulier, sont frappées de coups du sort déchirants, déprimants et attaquent les spectateurs jusqu’aux tripes. La réalisation d’Iñárritu, si parfaite, l’ambiance qu’il a su créer entre poésie et tension, la musique de Gustavo Santaolalla, si belle et si travaillée, les situations si désarmantes et tellement vraisemblables, font qu’on touche au génie et à la virtuosité des plus grands cinéastes au monde…

Javier Bardem habite son personnage, qui est presque de tous les plans. Récompensé par le jury de Cannes 2010 par un prix d’interprétation amplement mérité, l’acteur espagnol semble pouvoir tout jouer, du terrifiant meurtrier de « No country for old men » (Oscar du second rôle à la clé), au tombeur de ces dames si caliente de « Vicky Cristina Barcelona ». Ici, il hérite d’un rôle sur-mesure. Tout à la fois bon et mauvais, charitable et égoïste, terre-à-terre et spirituel, honnête et crapuleux, insouciant mais responsable… Uxbal est entier, et Bardem apporte toute la force de son regard, tout le poids de sa stature et toute la grâce de son aura pour donner vie à un homme certes brisé par la vie mais avant tout humble et définitivement humain.

L’humanisme, c’est le liant de la filmographie d’Iñárritu, la pierre angulaire de son cinéma, dont la maturité d’écriture et de mise en scène atteint son paroxysme avec ce magnifique « Biutiful ».

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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