Banniere_11_films_de_separation_Saint_Valentin

DES IDIOTS ET DES ANGES

Un film de Bill Plympton

Un ange et des rapaces

Angel n’est pas un Saint… il a une grande gueule, il est grossier, voire même un peu pervers. Pourtant contre toute attente, un matin, il se réveille avec des ailes blanches dans le dos. Ces dernières semblent vivre indépendamment d’Angel qui, lui, ne cherche qu’une chose : s’en débarrasser. Mais comme il lui est impossible de se les faire ôter, il les cache, les dissimulant sous des bandages. Un jour, dans le bar où il a l’habitude de se rendre, son secret est percé et il devient l’objet de la convoitise d’hommes malhonnêtes…

Pour ma première expérience "Plymptonienne", je dois dire que c’est enchanté, et certes un peu désorienté, que je suis sorti de la projection de son film, « Des idiots et des anges ». Comment, en effet, ne pas être charmé par cette histoire ? Ecrit et mis en images par Bill Plympton le scénario traite de la nature humaine, de la dualité des sentiments, de notre part de bonté et de méchanceté, de la rédemption…

Le tout avec un personnage principal de choix : un homme détestable qui se voit pousser des ailes d’ange dans le dos, appendices qui deviendront la convoitise des deux hommes jaloux, bourrés d’arrogance et d’avidité : son médecin et un patron de bar. Une magnifique histoire, qui lorgne du côté du conte et de la fable, à raconter aux plus petits et à montrer aux plus grands !

En effet, le traitement a de quoi désorienter le spectateur. Ce film est une expérience vraiment inédite que l’on peut largement conseiller aux férus de films d’animation car elle vient compléter une palette déjà haute en couleurs entre les studios Disney (« Bienvenue chez les Robinson » ou "Volt"), Pixar (« Wall-E »), Dreamworks (« Kung-fu Panda »), Ghibli (« Le château ambulant »), Folimage (« Mia et le Migou ») et Sony (« Persepolis »).

Bill Plympton est très loin de cette imagerie finalement "propre sur elle". Son style unique donne à ses films en général (« L’impitoyable lune de miel » ou « Les mutants de l’espace »), et à « Des idiots et des anges » en particulier, une double particularité qui tranche ainsi avec nos habitudes des films d’animation : premièrement son coup de crayon assez "rude" et deuxièmement son ton "féroce". Ce à quoi nous pouvons ajouter pour ce film-là une troisième spécificité : Plympton a abandonné tous dialogues pour ne jouer que sur les musiques et les onomatopées. Le fond est en harmonie avec la forme : ses traits épais, ses couleurs grises et noires, ses visages gras, presque déformés correspondent en effet à l’univers et à l’ambiance "Plymptoniens".

Pour le choix de la bande-son, Plympton a voulu tout le contraire de son précédent long-métrage « Hair high ». Alors que ce dernier avait bénéficié de la prestation de comédiens de renom, pour « Des idiots et des anges » il a refusé d’emblée de doubler les voix pour ne travailler qu’avec de la musique (Pink Martini entre autres) et des effets sonores ! Aucun dialogue… et, tel "Wall-E" qui n’a pas la parole mais que l’on comprend instantanément, Angel et les autres personnages de son film sont si expressifs, et la réalisation est si réussie, que finalement tout se passe de commentaires ! Nous fonctionnons admirablement à l’inverse de l’exercice de la lecture d’un roman où, à partir des mots de l’auteur, nous créons un univers visuel : ici, à partir des images qui défilent sous nos yeux, on attache aisément l’histoire imaginée par le dessinateur.

Voici donc un film d’animation hors norme (à déconseiller cependant à nos chères têtes blondes de moins de 10 ans), parfaitement mis en images et en sons, et qui se vit comme une expérience unique invitant le spectateur à se (re)plonger dans l’univers si particulier de Bill Plympton, une figure bien à part dans le paysage cinématographique d’animation.

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

À LIRE ÉGALEMENT

Laisser un commentaire