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WELCOME

Un film de Philippe Lioret

L’un des plus beaux films français de ce début d’année

Bilal, jeune kurde de 17 ans, arrive à Calais après avoir parcouru des milliers de kilomètres depuis l’Irak. Il compte rejoindre sa promise qui vit à Londres, où elle l’attend patiemment. A Calais, il retrouve Zoran, un ami qu’il croyait en Angleterre mais qui lui explique qu’entre les contrôles des camions, des bateaux et des trains, lui et d’autres immigrés se retrouvent dans un no man’s land français où ils ne sont plus les bienvenus… Bilal n’entend pas baisser les bras et compte bien rejoindre sa belle. Par tous les moyens…

Après « The visitor » de Tom McCarthy (Grand prix du jury de Deauville en 2008) et plus récemment « Frozen river » de Courtney Hunt et « Eden à l’ouest » de Costa-Gavras, l’immigration est à nouveau au cœur du cinéma avec « Welcome » de Philippe Lioret.

Ici, le réalisateur raconte l’histoire d’un jeune kurde de 17 ans qui après s’être échappé de son pays en guerre et avoir marché des milliers de kilomètres va tenter de rejoindre l’Angleterre depuis Calais… à la nage. Celui-ci décide en effet de prendre des cours de natation pour traverser le bras de mer qui le sépare de sa fiancée, et de braver les forts courants, les gros tankers et l’eau à 10°C.

C’est Vincent Lindon, maître nageur sauveteur et ancien champion de natation, qui prendra sous son aile le jeune immigré. On sent bien qu’au départ, cette bonne action n’est que prétexte pour épater son ex-femme qui lui a demandé le divorce. Mais on sent aussi qu’il est finalement touché en plein cœur par le destin de ce jeune et de toute cette communauté de réfugiés qui ont pour seul malheur de ne pas être nés dans le bon pays.

Philippe Lioret a pris le risque de faire un film politique, engagé et qui ne plaira sûrement pas aux puristes sarkosystes. Il montre l’état policier dans lequel les calaisiens vivent et qui n’est pas étranger à la politique d’immigration du gouvernement actuel. Il montre comment les services de la police ont ordre d’empêcher tout acte de solidarité envers les populations sans-papiers, obligeant les concitoyens de Calais à se justifier s’ils sont arrêtés avec des réfugiés dans leur voiture, ou les menaçant de prison s’ils en hébergent chez eux…

Le dégoût et l’écoeurement prennent le dessus à ce stade du film.
Le réalisateur montre également comment les populations locales se comportent face à ce quotidien. Un videur de supermarché empêche des réfugiés d’entrer « pour le bien des clients » et un calaisien dénonce son voisin qui loge un réfugié. Lioret, l’air de rien, pointe du doigt les ressemblances avec le traitement des juifs pendant une certaine seconde guerre mondiale.

Les comédiens sont parfaits dans leurs rôles. Vincent Lindon campe, à la perfection, un bourru plein d’humanité avec son flegme légendaire et sa conviction intacte. Audrey Dana se révèle à nos yeux ébahis et ramène à la même force de jeu que Mélanie Laurent dans le précédent Lioret « Je vais bien, ne t’en fais pas ». Enfin, Firat Ayverdi, le jeune kurde, s’impose comme un jeune acteur à suivre qui n’a littéralement pas peur de se mouiller et qui montre en quelques regards la profondeur de la condition de son personnage. Troublant.

« Welcome », qui signifie « Bienvenue » en français, passe pour une promesse presque impossible à tenir, tant il est difficile de dire aujourd’hui que « tout le monde » est le bienvenu « partout ». Le film, puissant émotionnellement, intense dans son engagement, est finalement l’un des plus beaux du moment et l’un des meilleurs films français depuis le début de l’année. Il fait partie de ces œuvres que l’on a envie de porter haut et de faire découvrir au plus grand nombre… Alors jetez-vous à l'eau et allez le voir.

Mathieu PayanEnvoyer un message au rédacteur

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