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PREMIERES NEIGES

Un film de Aida Begic

POUR: Niveau +3 - Les fruits du bonheur

Dans un village de Bosnie, où ne vivent plus que des femmes et leurs enfants, ainsi qu'un unique vieillard, deux hommes débarquent avec la ferme intention d'acheter les terres pour de riches investisseurs étrangers. Sera-ce là la signe d'un départ ?...

Laborieux mais victorieux ! Après six années de recherches et de travail, Aida Begic nous offre un film marquant par son réalisme et sa sensibilité. S’il est difficile de réaliser un film en Bosnie, ça l’est d’autant plus pour une femme voilée : elle accomplit donc une double performance. Replaçons-nous dans le contexte : 1997, nous sommes en Bosnie de l’est, dans un petit village ruiné physiquement et moralement après la guerre qui a accompagné l’éclatement de l’ex-Yougoslavie. Cette tragédie entraîna le massacre d’hommes et laissa un pays détruit aux femmes, seules - “ Tous nos hommes ont été tués ”. Aida Begic défend la cause de ces femmes qui sombrent dans l’oubli malgré le travail qu’elles ont fourni, passant outre leur douleur.

Après la perte de leurs maris et enfants, six femmes, un grand père et cinq enfants doivent accepter la vérité pour enfin faire le deuil et se reconstruire. Assumant leurs responsabilités, reprenant leur travail agricole, elles se prennent en main dans l’espoir de faire fortune en nourrissant la moitié de la Bosnie grâce à Slavno, le fameux village.

Tel un leitmotiv, la foi est omniprésente dans ce film et permet aux personnages de se soutenir. De façon habile et sans trop d’insistance, la réalisatrice nous montre l’importance du rite commun qui rythme le quotidien dans cette culture. Retenons la scène de prière dans un monument en ruine face à un paysage vertigineux ! Aida Begic utilise avec aisance la beauté de ses contrées dépeuplées et bucoliques. Les couleurs vives et éclatantes des fruits ainsi que les étendues verdoyantes nous séduisent et nous envoûtent pour un instant de plaisir à la fois visuel et gustatif.

La guerre, tragique et violente, est traitée ici de manière explicite mais non brutale. L’avant dernière scène cadrant le cimetière suggère l’accomplissement du deuil, permettant ainsi l’accès au bonheur. Un film éblouissant pour un premier long-métrage. Attendons le prochain !

Camille ROLLAND, Margaux JANIN
Lycée Saint Exupéry, Lyon

Lycée Saint-ExupéryEnvoyer un message au rédacteur

Le sujet à la base de « Snow » a encore rarement été abordé. Seul le troublant « La vie secrète des mots » d'Isabel Coixet avait osé s'aventurer sur le terrain des sévices subis par les femmes de Bosnie, lors de la guerre, au début des années 70. Le parti-pris, fort à propos, de « Snow » est de n'évoquer la disparition des hommes que de manière furtive, alors qu'il nous introduit à l'ensemble de ces personnages féminins, qui composent les restes d'un village moribond. Pour elles, la question sera simple: pour recommencer à vivre et à espérer, faut-il faire table rase du passé, ici en vendant l'ensemble des terres, et en abandonnant ces lieux, emplis d'épouvantables mémoires?

Bien difficile de répondre, pour un occidental assis bien au chaud dans son fauteuil. Aussi, le spectateur se laisse guider par ces personnages, aux prises avec des cas de conscience personnels, des disparitions pas si claires, et des réactions bien humaines, contrôlées par l'appartenance à une minuscule communauté. Malheureusement, la réalisatrice n'arrive jamais à insinuer entre ses personnages une réelle défiance ou une ambiguïté, que les deux personnages d'étrangers masculins, auraient pu provoquer ou charrier à merveille. Cela génère un manque de tension dommageable à l'histoire et à son dénouement, potentiellement bouleversant.

D'autant plus que la symbolique pesante n'est pas loin, avec une vieille dame qui termine un tapis, alors que les traces des hommes disparus pourraient bien être enfin retrouvées. Si « Snow » réussit à être un film pesant, il manque cruellement de fantômes du passé, et n'arrive finalement guère à traiter son sujet: la nécessité de retrouver confiance en l'autre... en l'homme.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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