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INTERVIEW

SEIGNEURS DE LA MER (LES)

Le combat de toute une vie

Rob Stewart, plongeur et instructeur de plongée, photographe animalier et biologiste est un activiste passionné qui défend la cause des requins, la préservation des océans et, par extension, celle de notre planète. Il nous a accordé un long entretien au cinéma C…

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Le combat de toute une vie

Rob Stewart, plongeur et instructeur de plongée, photographe animalier et biologiste est un activiste passionné qui défend la cause des requins, la préservation des océans et, par extension, celle de notre planète. Il nous a accordé un long entretien au cinéma Comoedia, très détendu, souriant et content de pouvoir partager sa passion et de défendre sa cause.

Cette passion pour les requins et la mer remonte à sa plus tendre enfance. Quand on lui demande comment on peut s’approcher des requins et jouer avec comme il le fait dans le film, il nous répond en riant qu’il joue avec les requins depuis qu’il est enfant et aussi que pour pouvoir prendre un requin dans ses bras, il suffit de le gratouiller sous le museau. Il prend bien soin de préciser qu’il ne faut pas répéter cette expérience : il faut aussi être biologiste, avoir de l’expérience et ne surtout pas les retourner sous peine d’être attaqué…

S’il s’est lancé dans son projet de film, c’est parce que face à des pêches illégales, non maîtrisées et catastrophiques pour l’environnement, il a voulu monter un fond de soutien aux requins en partenariat avec des magazines. Son fond de soutien n’a rien récolté et il s’est rendu compte qu’il fallait que l’opinion générale sur les requins change, avant de réussir à lancer une dynamique de préservation.

Au départ, il voulait faire un simple documentaire sur les requins. Il a emprunté de l’argent autour de lui, a loué une caméra et s’est lancé sans aucune expérience de cinéma. Le documentaire va rapidement être bousculé par la réalité : braconniers, mafia, corruption etc.

Le pire moment pour Rob Stewart, c’est quand il s’est retrouvé hospitalisé en Amérique du Sud, gravement malade, endetté à hauteur de 200.000 $ et sans avoir pu filmer une seule image de requin. Ses difficultés ne se sont pas arrêtées là. Il lui aura fallu 5 ans pour réaliser ce film commencé à l’âge de 22 ans.

Une fois rentré de ses aventures, il a dû trouver quelqu’un pour faire le montage et de nouveaux problèmes se sont présentés à lui : n’étant pas réalisateur, Rob n’avait pas formalisé son scénario dans les détails. Il a dû à plusieurs moments arrêter le montage et repartir pendant des mois pour tourner des images qui manquaient.

Tous ces efforts n’ont finalement pas été vains. Le film tient ses promesses : les préjugés tombent, la prise de conscience du public opère et notamment avec les enfants qui s’intéressent beaucoup à cet animal. Du côté des lois, ça avance aussi mais très lentement. Le Costa Rica a pris des mesures, mais qui sont peu respectées depuis que la pression publique est retombée. Aux Etats-Unis deux espèces de requins ont été ajoutées à la liste des espèces protégées grâce à la pression des membres du site www.savingsharks.com.

Mais il y a toujours des ventes et des exportations d’ailerons de requin. D’où viennent t-ils ? De quasiment tous les pays, y compris la France qui est en tête des exportations d’ailerons en Europe… L’Union Européenne (et 16 autres pays) ont bien interdit la pêche, mais l’importation reste autorisée. On peut donc en toute légalité faire entrer des ailerons de requin sur le territoire français et les exporter, à condition qu’ils ne soient pas arrivés par bateau de pêche…

Rob Stewart pense que seule une interdiction totale comme pour l’ivoire pourra arrêter les trafics et la vente. La population mondiale de requins a baissé de plus de 90 % en 2007.

Quand on demande à Rob si son combat n’est pas perdu d’avance, face à des industries très puissantes et aux vues des bénéfices énormes réalisés par la vente d’ailerons de requins, il répond qu’il y a des signes encourageants. Même en Asie, principal consommateur de requin, des groupes se constituent. A ses yeux, le plus gros problème est un problème de prise de conscience. Et il termine l’entretien par ces mots :

« Je crois en l’humanité et sa compassion pour les générations à venir, s’ils savaient ce qui se passe dans les océans et que toutes les industries de pêche auront disparu en 2028 (ou au moins 90 % d’entre elles) et que nous dépendons des océans, je pense que l’humanité se mobiliserait comme jamais avant. Le plus gros problème que nous avons actuellement c’est la préservation des espèces, car il ne s’agit pas que de sauver des espèces mais aussi de sauver l’humanité. Aujourd’hui, il faudrait six planètes Terre pour maintenir notre consommation actuelle. Je pense que de la même façon que les gens se sont mobilisés contre l’esclavage, le droit des femmes, le réchauffement climatique… si l’humanité savait pour les océans, elle se mobiliserait… du moins je l’espère. »

Son combat ne fait que commencer. Il le débute avec ce film. Un document à voir absolument.

Benoît Michou Envoyer un message au rédacteur

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