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INTERVIEW

JANIS ET JOHN

Pourquoi avoir choisi de placer vos personnages dans l’atmosphère musical des années soixante ?

SB : Parce que c’est encore actuellement le courant musical le plus riche. Ça foisonnait, il se créait un groupe par jour. J’ai une passion pour le mythe du rock’n’roll

Il y a u…

© Patrice Riccota

Pourquoi avoir choisi de placer vos personnages dans l'atmosphère musical des années soixante ?

SB : Parce que c'est encore actuellement le courant musical le plus riche. Ça foisonnait, il se créait un groupe par jour. J'ai une passion pour le mythe du rock'n'roll

Il y a un côté très théâtral dans la mis en scène du film…

SB : Ce côté théâtral était voulu, je recherchais quelque chose de très symétrique, notamment dans la maison ; c'est pour donner cet effet que l'on veillait à toujours placer la caméra sur un point central pour être en face de la scène. Toutes les banlieues deviennent des petites banlieues américaines : on peut vivre en autarcie. On traverse des villes avec les mêmes pavillons, les mêmes banlieues, le même Conforama au bout de la rue, où tout est tout droit, où tout est trop équilibré. Il fallait rendre ça par le jeu de caméra…

Vous avez choisi une comédie pour votre premier film…

SB : ce n'est pas vraiment un choix en tant que tel, je n'avait pas envie en particulier de faire une comédie qui finissent par un drame… On l'a écrit dans notre état d'esprit. Et c'est vrai c'était une recherche plutôt ludique des choses. Mais on s'est surtout laissé porté par les choses comme elles venaient. L'intérêt pour le couple par exemple est apparu à l'écriture, mais vraiment ensuite au moment du tournage. En tout cas on n'a jamais réellement voulu un genre pour ce film. Comme pour l'agencement des scènes musicales avec les autres scènes, on a fait ça comme ça venait.

On a l'impression dans votre film, que c'est la solitude de ces personnages qui les réunit et qui fait qu'ils se retrouvent…

SB : C'est un thème fort du film et un sujet qui m'intéresse en général, les gens sont seuls, ont besoin de se retrouver. Dans notre film les six personnages sont également seuls, même s'il y a un couple dans le lot. A la fin ils forment trois couples, fébriles, mais des couples. Ils finissent par se retrouver, sans vraiment se retrouver. D'ailleurs, la fin du film ne correspond pas avec la fin du scénario. Il y avait beaucoup d'explications, … mais finalement c'était trop. On a préféré garder les dernières vingt minutes, quasiment muettes.

Pourquoi avoir choisi " Where is my mind ? " (The Pixies) pour clore le film ?

SB : Parce que pour moi Franck Black et tous les autres, ce sont les meilleurs artistes qui ont jamais existé. Et ce que dit la chanson, est beau et parlant. même les guitares disent quelque chose, il y a là quelque chose qui bouscule…

Vous n'avez pas eu trop de problèmes de droits, pour utiliser du Janis Joplin, du John Lennon…

SB : C'est la première qu'on a mis au point avec le producteur. On avait vu ça avec Stewart Copland (l'ancien batteur de Police), pour lui, ce n'était pas possible d'obtenir toutes les autorisations. La première estimation c'était 20 millions de francs de droits. Et puis on a eu beaucoup de chance : pour " Isolation " de Lennon, on doit remercier Yoko Ono qui nous a laissé les droits gratuitement après avoir lu le scénario. Et pour Joplin, c'est à sa sœur qu'on s'est adressé, et pareil, on n'a rien eu à payer. Une fois qu'on avait obtenu ça, pour les autres chansons, ça a été plus facilement. Mais de toute façon, je voulais les Pixies.

C'est avec cette musique que Brigitte (Marie Trintignant) se libère…

SB : Oui car par cette musique, passent des valeurs des années soixante, des valeurs d'émancipation oubliées. C'est un vrai chemin de vie pour elle. Les années soixante et soixante-dix étaient riches d'humour, de ludisme, or les gens dangereux n'ont pas d'humour. Au cours du film, Brigitte prend du ludisme, du bonheur, et la musique doit marcher avec ça.

Quels sont vos modèles, vos références en tant que réalisateur ?

SB : Elles sont plutôt anglo-saxonnes concernant la manière de filmer, au niveau es scénaristes, Salvadori, Cédric Camu. Mais il y a aussi toute une nouvelle génération américaine, comme Fincher, ça paraît peut-être facile mais c'est ce qui me plaît. On entend toujours dire qu'il ne faut pas pomper…si ça me plaît, je m'en inspire, certains films ont un univers dont on peut s'imprégner et utiliser.

Pourquoi avoir choisi, Sergi Lopez pour incarner Pablo, parce qu'il est étranger ?

SB : Je voulais quelqu'un de latin, parce que ça allait avec la poésie du personnage. J'ai renconré Sergi juste après la fin de l'écriture du scénario, et tout de suite, c'était lui…

Et vous Sergi, pourquoi avoir accepté le rôle ?

SL : J'ai été attiré par lui (il se tourne vers Samuel Benchetrit). Je ne connaissait ni Samuel, ni Marie (Trintignant), ni Cluzet. Mais quand j'ai été chez Lui et Marie, il a attisé ma curiosité, on a pas parlé du film, il était en ébullition, … Ensuite je n'ai pas choisi en fonction du rôle mais plutôt en fonction du scénario. C'est comme ça que je fonctionne, j'aime que le scénario soit intéressant, original, mais parfois c'est à la limite… Je ne suis pas du tout cinéphile, donc je ne connais pas d'acteurs, de réalisateurs, … donc ça n'a pas d'importance pour moi. Et puis j'ai eu envie de travailler avec eux tout de suite.

Ça vous a demandé un effort particulier pour jouer le film ? (s'adressant à Sergi Lopez)

SL : Pas vraiment, j'ai fait quand même un effort parce qu'il paraît que c'est mieux quand on comprend les dialogues… En général, ça va mais avec certains mots…

Et les autres personnages ? (s'adressant à Samuel Benchetrit)

SB : Pour Christophe Lambert et Cluzet, j'avais déjà la volonté de les avoir avant d'avoir écrit le film. Cluzet est exceptionnel, il a une capacité de rythmes et de ruptures… c'est naturel chez lui. Quant à Christophe Lambert, dans la vie il a un charisme incroyable. Même si j'ai eu autour de moi des réactions bizarres quand j'annonçait qu'il participait au film, je savais qu'il ne serait pas décevant. En plus, je salue le fait qu'il ne soit pas complexé de sa carrière, et pourquoi le serait-il ? Et il ne joue pas sur son image comme on le dit souvent.

Comment s'est passé le tournage ?

SB : On a eu dix semaines de tournage, en communauté, on était tous proches, les gens avec qui je travaille sont des amis, la famille, on s'est beaucoup marré. Tout le monde était dans le même état d'esprit, on voulait le même film. Un film, en fait ce n'est que des rencontres et là il y a toujours quelque chose de beau. Je n'aime pas les ambiances tendues pour travailler, donc je choisis des personnes pour le tournage, avec qui je sais qu'on peut vraiment travailler ensemble.

Comment s'est organisée l'écriture du scénario ?

SB : Gabor ? … (Ils se regardent, rient, se lancent des phrases qu'ils sont seuls à comprendre) On a une idée sur laquelle on travaille ensemble, on lance des idées, on parle, … Gabor interprète tous les personnages du film. On a déjà travaillé sur des scénarios, Gabor est auteur de théâtre. On n'avait jamais travaillé à deux, mais on se connaissait déjà donc c'était plus facile. On a mis 4-5 mois à faire la première version du scénario. On a fini le film fin avril, donc même la dernière image sur Marie Trintignant faisait déjà partie du montage. On a décidé de ne rien changé à ce film malgré ce qui s'est passé. Le film était déjà un hommage à elle et à ce personnage.

Anthony REVOIR Envoyer un message au rédacteur

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