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INTERVIEW

COMBATTANTS (LES)

Thomas Cailley

Thomas Cailley était à Lyon pour présenter son premier film lors de l’avant-première organisée au Comoedia. Compte rendu de cette rencontre :

Accueil Cannes

C’est un baptême qui a démarré très fort pour Thomas Cailley, jeune réalisateur qui a eu beaucoup de retours …

© Haut et Court

Thomas Cailley était à Lyon pour présenter son premier film lors de l’avant-première organisée au Comoedia. Compte rendu de cette rencontre :

Accueil Cannes

C’est un baptême qui a démarré très fort pour Thomas Cailley, jeune réalisateur qui a eu beaucoup de retours du public lui permettant de comprendre ce qu’ils ont fait, car pour lui, le processus de création d’un film est une perpétuelle déconstruction. À la projection cannoise, Thomas Cailley était heureux d’entendre que les spectateurs riaient avec les personnages et non pas des personnages. Il y avait de l’empathie dans les rires entendus. Ceci l’a conforté dans le fait qu’il avait eu raison de croire à une certaine forme de comédie avec un ton particulier sur la rencontre de deux personnages singuliers.

Thomas Cailley admet qu’il n’a pas les cartes pour faire des comédies romantiques traditionnelles pour la simple et bonne raison qu’il n’en regarde pas. Il arrive, à la place, avec ses codes de films d’aventure et de buddy movie pour raconter une histoire d’amour. Le réalisateur confesse qu’il est par ailleurs difficile de croire à la comédie jusqu’au bout lors de l’étape du montage puisque les scènes sont vues 140 fois. Dans « Les Combattants », tout est dans le rythme et lorsque l’effet se dissipe, il est difficile de faire toujours confiance à l’efficacité de la scène et de ne pas la couper au risque de rater des transitions cruciales. Par exemple, la scène de la station-service était périlleuse puisque l’on sort d’une scène comique (l’entrée avec le Famas dans la station) pour déboucher sur une émotion avec un chien.

La genèse et l’écriture

Il y a trois ans, Thomas Cailley est retourné dans la région des Landes de Gascogne, sa terre natale. Le paysage très horizontal, avec ses routes toutes droites, ses forêts et ses lacs qui ne bougent pas, l’inspire. Le calme apparent de ces vastes étendues, bien souvent interrompues par les séquelles de grosses tempêtes, lui font imaginer ses personnages : Arnaud pour le calme plat, perturbé par une tempête (Madeleine).

L’autre élément qui l’a inspiré est l’émission « Man vs wild » qu’il regardait lorsqu’il rentrait tard des longues soirées de montage de son précédent court métrage. Bear Grylls, l’animateur de ce programme, l’amuse et pour Thomas Cailley, il s’agit-là d’un personnage qui représente bien son époque dans sa quête d’intensité qui le pousse à des comportements suicidaires. Le réalisateur considérait qu’il était un bon point de départ dans la construction d’un personnage tragi-comique tel que Madeleine.

Avant l’écriture, le réalisateur disposait d’un certain nombre de scènes qu’il souhaitait utiliser dans un long-métrage (la scène de la barque, du maquillage, du micro-onde). L’auteur/réalisateur a pris soin de gérer ce qu’il appelle les pleins et les creux entre les personnages. S’il y a un plein dans un personnage, alors il faut chercher un creux chez un autre afin préserver l’équilibre. Madeleine devait être forte d’emblée, en toute radicalité. C’était le plein. Le creux, c’est Arnaud qui a une candeur, une bienveillance envers le personnage de Madeleine un peu antipathique. Thomas Cailley pense qu’à partir du moment où Arnaud ne la juge pas et la regarde avec bienveillance, le spectateur en fait de même. Et si cela fonctionne, le pari de faire croire à une histoire d’amour est gagné et la narration peut se permettre de se passer de scènes explicatives.

Thomas Cailley avoue ne jamais penser à des acteurs lors de l’étape d’écriture. À la version finale du scénario, le choix d’Adèle Haenel pour le personnage de Madeleine s’est imposé, même si, à l’époque, elle n’était pas vue comme une actrice de comédie. La rencontre a confirmé l’évidence en voyant Adèle s’exprimer à toute vitesse. Elle porte également dans son regard quelque chose de très déterminé et droit mais aussi de complètement insaisissable, ce qui paraissait essentiel pour interpréter Madeleine.

Kevin Azaïs, qui a fait quelques apparitions dans des films mais qui est principalement plombier-chauffagiste, a au départ été embauché pour un autre rôle (Xavier, qui décapsule les bières avec les dents) mais le Arnaud idéal n’a jamais été trouvé lors de tous les castings sauvages qui ont été menés. Et finalement, le réalisateur s’est rendu compte qu’Arnaud, c’était exactement lui. Thomas Cailley se dit entièrement satisfait des choix finaux du casting.

Ses intentions sur le film

Le film démarre comme une chronique horizontale, qui pourrait vraiment se suffire à elle-même, mais il prend, à la place, la forme d’un glissement qui ne fait qu’avancer systématiquement en crescendo continu. Pour Thomas Cailley, le film devait raconter le trajet d’une forme de réalité vers une forme de fiction. On démarre sur un récit très ancré dans le réel à partir du personnage d’Arnaud et son quotidien. Puis, la fiction s’immisce dans sa vie à travers le personnage de Madeleine qui a une vision du monde un peu fantasmée sur cette communauté un peu étrange qu’est l’armée. Ils vont ensuite en construire un troisième : leur utopie à eux.

Thomas Cailley admet enfin qu’il y a une certaine hétérogénéité via la succession de vignettes comiques. Il se rappelle notamment, lorsqu’il cherchait des financements, qu’on l’interrogeait souvent sur ce qui allait faire l’unité de toutes ces scénettes. Il répondait naïvement que la mise en scène allait faire le liant avant de s’apercevoir qu’il ne fallait justement pas que ce soit la mise en scène mais bien les personnages, qui sont en fait les moteurs du film.

Alexandre Romanazzi Envoyer un message au rédacteur

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