DOSSIERSéries TV

Critique Série : ASTÉRIX ET OBÉLIX : LE COMBAT DES CHEFS

Mini-série d’animation créée par Alain Chabat, avec la collaboration de Benoît Oullion et Pierre-Alain Bloch (Piano), d’après les bandes dessinées de René Goscinny et Albert Uderzo
Réalisation : Alain Chabat et Fabrice Joubert
Avec les voix d’Alain Chabat, Gilles Lellouche, Thierry Lhermitte, Anaïs Demoustier, Laurent Lafitte, Jean-Pascal Zadi, Grégoire Ludig, Géraldine Nakache, Grégory Gadebois, Fred Testot, Jérôme Commandeur, Jeanne Balibar, Stéfi Celma, Alexandre Astier, Pio Marmaï, Gérard Darmon, Xavier Fagnon…

Première diffusion en France : 2025 sur Netflix
Format : 32 à 43 minutes par épisode (5 épisodes)

Synopsis

Alors que des célébrations du triomphe de César se préparent, il reste un hic : le village des irréductibles Gaulois résiste toujours en Armorique. Une jeune Romaine, Métadata, suggère alors l’idée d’utiliser la tradition gauloise du combat des chefs pour s’emparer du pouvoir au sein du village. Et pour une fois, les circonstances pourraient être favorables aux Romains…

Critique : Alain Chabat de retour aux commandes d’un Astérix !

En guise de prologue, commençons par une remarque sur la durée : chaque épisode se terminant par 10 bonnes minutes de générique, ne vous fiez pas à la durée annoncée, il vous faudra bien moins de temps pour regarder l’ensemble ! Sauf si vous laissez défiler les génériques jusqu’au bout, cette mini-série peut se déguster assez rapidement, en un peu moins de 2 heures. "Astérix et Obélix : Le Combat des chef" aurait-il donc pu être un long métrage au lieu d’une série ? Pas sûr, car en termes de rythme et de pratique du cliffhanger, chaque épisode respecte bel et bien le format sériel, ce qui justifie pleinement ce choix.

Disons clairement ce que beaucoup de monde pense : voir Alain Chabat revenir du côté d’Astérix est plus qu’alléchant. A-t-on besoin de rappeler que son long métrage "Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre" (2002) a connu un immense succès en salles (avec plus de 14 millions d’entrées, il était alors le 2e plus grand succès d’un film français au box-office national après "La Grande Vadrouille" et seuls "Bienvenue chez les Ch’tis" et "Intouchables" l’ont dépassé depuis), qu’il est devenu franchement culte sur bien des aspects et qu’il est, de l’avis général, de loin la meilleure adaptation live d’Astérix ?

Plongeons donc dans ces réjouissantes retrouvailles entre Astérix et Chabat (qui avait entre-temps assuré une voix dans "Astérix : Le Domaine des dieux" en 2014). Tout commence avec un premier épisode constitué majoritairement d’un long flashback sur l’enfance des héros, proposant une très libre relecture de l’album hors-série "Comment Obélix est tombé dans la marmite du druide quand il était petit" (paru en 1989 après une première publication en 1965 dans "Pilote"). Après une intro très stylisée qui affiche visuellement les onomatopées, cet épisode inaugural propose un équilibre plutôt juste entre humour et tendresse, avec un peu de soupçon dramatique sur la thématique du harcèlement. Le drame ne prend toutefois pas trop le pas sur l’univers habituel d’Astérix, ne tombant donc pas dans les mêmes travers que le long métrage de 1985 "La Surprise de César". On pourra être un peu plus critique sur ce point concernant le dernier épisode, dans lequel combats et tensions s’étirent assez longuement, au point d’oublier un peu la légèreté qu’on attend d’un Astérix. De façon générale, on peut même constater que la dose d’humour est assez variable au fil des épisodes, alternant des passages qui en manquent et d’autres où les gags s’enchaînent à grande vitesse. Heureusement, rien n’empêche le plaisir global que l’on prend à regarder ces 5 épisodes, dont les 4 derniers reprennent dans les grandes lignes le récit de l’album "Le Combat des chefs" paru en 1966, tout en prenant de nombreuses libertés par rapport au matériau d’origine.

Le principal atout du "Combat des chefs" est évidemment l’humour typiquement « chabatien » ou « nulien », à base d’absurde, de parodies, d’anachronismes et de clins d’œil variés, le tout avec une inventivité récurrente en termes de mise en scène ou de graphisme. Parmi les temps forts de grosse rigolade, on retiendra tout ce qui concerne la folie de Panoramix (conséquence d’un jet de menhir hasardeux d’Obélix), avec les répliques délicieusement décalées du personnage et deux des séquences les plus ingénieuses de la série (toutes deux dans l’épisode 3 qui a tout pour devenir culte !) : une fausse série pour enfants intitulée "Panono" (qui lorgne du côté des "Télétubbies") et une scène montrant un enchaînement de tentatives de préparation de potion sous forme de clip coloré sur fond de "Bombastic" de Shaggy. Les choix musicaux sont d’ailleurs une autre grande réussite, tant pour le rythme que pour la subtilité de certains échos qui nécessitent un peu d’attention (par exemple, dans cette même scène, Obélix éternue à cause d’une poudre au moment où les paroles de Shaggy utilisent le verbe « sneeze »).

Comme souvent chez Chabat, la série regorge de références variées, tant dans les répliques (comme le duo Omar et Fred qui se cache dans des ingrédients de la potion…), l’image (par exemple le générique de James Bond, là encore dans la séquence "Bombastic", ou l’affiche de "Star Wars 9" devenue une mosaïque pour honorer César) mais aussi le son (on vous laisse détecter, dans les bruitages, des sons issus de "Burger Quiz" et du logo de la société Chez Wam !) et évidemment les noms des personnages inédits ("Fast and Furious", "Twin Peaks", Hanna-Barbera…). Il y en a pour tous les goûts du côté de ces nombreux easter eggs et clins d’œil (plus ou moins faciles à repérer) : les vieux jeux vidéo pixélisés (ici en mosaïque), le cinéma muet, l’attraction de Disney « It’s a Small World », les super-héros Marvel, "Les Temps modernes" de Chaplin, "Pulp Fiction", la poupée ventriloque de "South Park"….

Terminons sur le casting de voix, globalement très enthousiasmant.  On peut toutefois se montrer plus réservé concernant la performance vocale de Gilles Lellouche en Obélix, qui est peut-être le plus grand défaut de la série à cause de son hétérogénéité : s’il respecte souvent la candeur ou la balourdise d’Obélix, l’acteur est beaucoup moins convaincant dans certains passages où il semble parler de façon bien trop « normale », avec un ton qui ne correspond guère au personnage. Chabat lui-même, en Astérix, est bien plus convaincant, et on a plus de mal à reconnaître sa voix pour les deux autres personnages qu’il double : Agecanonix et Touinepix, l’arbitre du combat. Les voix les plus hilarantes sont à mettre au crédit de Thierry Lhermitte, excellent en Panoramix, de Jean-Pascal Zadi (le centurion Potus), de Jérôme Commandeur (qui s’occupe à la fois de la mère de César, persiffleuse à souhait, et de Blackangus, un ex-gladiateur réac qui commente le combat) ou encore Gérard Darmon (Toutéobofix, l’ancien chef du village). Anaïs Demoustier (Métadata), Laurent Lafitte (César) ou Grégory Gadebois (Aplusbégalix) n’ont pas à rougir non plus, mais marquent moins les esprits car leurs personnages sont un cran en-dessous en termes de drôlerie.

Raphaël Jullien Envoyer un message au rédacteur

À LIRE ÉGALEMENT