WET MONDAY

Un film de Justyna Mytnik

Ode à la sororité

Klara a 15 ans et vit son adolescence entre la foi présente dans son petit village et l’émancipation à portée de main avec sa grande sœur et ses amies. Un traumatisme refait surface à l’approche du lundi de Pâques ou « wet monday », qui se traduit par une peur de l’eau. Klara, avec l’aide de sa nouvelle amie, l’excentrique Diana, essaye alors de retrouver les souvenirs de la précédente fête de Pâques, qui semble avoir tout fait basculer…

Après ses remarqués courts-métrages et documentaires (notamment "How to become a pope" en 2017, qui reçut le prix du meilleur documentaire au festival de Varsovie), Justyna Mytnik nous présente un premier long-métrage qu’on reçoit comme un cri du cœur, en pleine face. Pourtant, ses héroïnes vivent coincées : entre la tradition et la foi chrétienne de leurs familles qui semblent d’un autre temps, leur envie féroce de s’émanciper et de vivre leur jeunesse, leur besoin de reconnaissance et les attentes que les hommes autour posent sur elles… Dans cette posture impossible, Klara fait face : elle embrasse ses contradictions, en continuant à suivre certaines traditions ou en gardant la foi, tout en décidant de mettre un coup de pied dans l’omerta qui règne pour se défaire de son traumatisme et vivre enfin pleinement.

Le film mêle habilement cette quête de la vérité sous la forme de rêves à la métaphore de quête chevaleresque, et la réalité bien plus grise de l’ennui qu’on essaye de tromper dans les villes de campagnes avec les sorties au bord de la rivière et les premières cigarettes. Dans ce quotidien, les femmes font bloc parfois avec maladresse, souvent avec complicité. Klara et sa sœur Marta ont une relation presque fusionnelle (leur mère, qui vit avec elles, est exclue de leur lien à tel point qu’elles donnent l’impression de vivre seules), qui devient peu à peu un carcan lorsque Diana la nouvelle amie de Klara prend de la place dans sa vie. Cette relation amicale apporte un souffle d’air à Klara et nous montre alors que l’amour est parfois étouffant, et qu’aimer n’est pas suffisant ; il faut parfois accepter d’écouter, chose que Marta n’acceptera de faire qu’à la fin du cheminement de sa sœur.

La réalisatrice ancre aussi son film dans les symboles : de la foi chrétienne aux métaphores de l’éveil à la sexualité, notre œil est attiré sans cesse par des indices qui nous donnent des clés de lecture sur les personnages et sur le monde qui les entoure. Justyna Mytnik a mis 7 ans pour écrire son film et trouver le ton juste pour raconter cette histoire universelle que beaucoup trop de femmes vivent et portent en secret. Le résultat est un film débordant de sincérité qui nous met la réalité en face des yeux tout en se souvenant de nous montrer qu’il y a de la beauté dans l’après, grâce aux femmes qui s’entourent et se soutiennent.

Océane CachatEnvoyer un message au rédacteur

BANDE ANNONCE

Laisser un commentaire