UN PAYS EN FLAMMES

Un film de Mona Convert

Dans le noir, l’étincelle

Dans des marais des silhouettes se déplacent lentement de nuit, en barques, allumant des mèches sur des arbres, et déclenchant un soudain feu d’artifices. Dans les environs, vaches et brebis sont surprises par le bruit et la fumée…

Voilà un documentaire hypnotique à expérimenter dans des salles aussi obscures que les lieux qui se retrouvent ici soudainement et ponctuellement illuminés par les essais pyrotechniques et artistiques d’une famille pleinement investie dans son art. Une implication qui confine à la fusion avec les environs, entre nature paisible qu’on utilise comme un support, et moments de convivialité qui semblent associer une partie de ceux qui profiteront du spectacle. Car non, il ne s’agit pas ici de zadistes, vivant en forêt dans des maisons de fortune, ou de personnes jouant sur leur propriété à créer un divertissement égoïste. Ici peu à peu le spectateur apparaît, par des cris ou applaudissements lointains, puis à la fin par des silhouettes qui s’agitent, festoyant.

En se concentrant sur une famille d’artificiers qui se transmet, de génération en génération, un savoir faire mais aussi un goût de l’expérimentation, Mona Convert concocte un objet étrange, fait d’intrusion de lumière dans la nuit, de bruits soudains qui réveillent vaches et brebis, d’apparitions soudaines d’êtres humains à l’allure d’astronautes ou de gros virus soudainement embrasé… Seul un sweat-shirt marqué d’un intrigant Piro’7 vient situer un peu l’entreprise familiale, comme l’utilité de réglages lointains. Intelligemment la lumière vient alternativement éclairer le visage de la fille et de son père, comme un trait d’union entre deux passionnés qui livrent un art brut, dont les retentissements percutent les entrailles, comme les éclats les pupilles, nous laissant au final avec une foule en ombre chinoises, aussi anonyme que conquise. Faire un petit tour par "Un Pays en fammes", belle surprise de la section Acid du Festival de Cannes 2024, est à coup sûr une expérience étrange et dépaysante.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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