TRON : ARÈS

Un film de Joachim Ronning

Dans le monde turbo-débilo-bolide, ne réfléchissez pas, ressentez !

Synopsis du film

14 ans ont passé depuis que Sam Flynn, rejeton du créateur d’une multinationale de jeux vidéo Kevin Flynn, est revenu du monde de la Grille, reprenant par la même occasion les rênes de la compagnie familiale. Mais voilà, les années passent et le wonderboy décide de partir en laissant la direction aux sœurs Kim. C’est alors que la société concurrente, Dillinger, est sur le point d’amener ce monde virtuel dans notre monde avec comme argument de vente la défense. Un programme du nom de Arès voit le jour et alors que celui-ci enchaîne les démonstrations, il va apprendre peu à peu sur sa condition et comprendre le sens du mot exister…

Critique du film TRON : ARÈS

L’arlésienne "Tron" est un joli cas d’école. La franchise Disney a beau exister depuis 1982, elle ne comporte alors que deux films, l’un sorti sous la houlette de Steven Lisberger (révolutionnant au passage l’animation et l’image de synthèse dans les années 80) et sa suite tardive "Tron Legacy" ("Tron : L’héritage" en français) sorti en 2011 et réalisé par Joseph Kosinski ("Oblivion", "Top Gun: Maverick" et dernièrement "F1"). Comptons au milieu de cette longue période d’inactivité des comics ainsi que des dessins animés continuant l’histoire, faisant le pont entre ces deux premiers volets ("Tron Uprising"). Avec son approche complètement innovante de guerre des étoiles dans un ordinateur, "Tron" a su marquer les spectateurs de l’époque tout en posant la première pierre de l’édifice. Mais la franchise n’a jamais été un succès tonitruant au box-office et l’envie d’attendre que les technologies s'améliorent avant de replonger dans ce monde si galvanisant explique l’attente considérable entre le premier volet et sa suite.

Pas moins de 14 ans plus tard et après moult tergiversations, la firme aux grandes oreilles balance à la poubelle la suite prévue à l’origine ("Tron : Ascension") et décide de lancer un semi reboot/suite avec Jared Leto en tête d’affiche en lieu et place de Garrett Hedlund et Olivia Wilde, les héros du volet précédent. Et pour couronner le tout, le studio annonce le réalisateur qui reprendra le flambeau, celui de "Pirates des Caraïbes : La vengeance de Salazar", loin d’être un bon film nous en conviendrons, à qui incombe la lourde tâche. L’auteur de ces lignes a dû faire un deuil du projet initialement prévu afin d'accueillir cette nouvelle version avec l’esprit le plus large possible. Et les problèmes de s’accumuler et de ressembler à s’y méprendre aux même tares dont disposent la plupart des blockbusters actuels : un trop plein de personnages avec des personnalités vues mille fois (l’AI qui découvre que les humains c’est chouette, le patron de multinationale un poil taré avec des problèmes d’Œdipe, une héroïne génie de la tech qui doit gérer son deuil…), un scénario inutilement tarabiscoté et un climax qui promet du lourd pour finalement retomber comme un soufflé.

La faute à une promesse pas tenue autour de cette idée que ce monde virtuel débarque dans notre monde réel. Une belle idée qui réside dans les cendres de ce qu’aurait dû être ce troisième volet, avec une exploitation qui frise le zéro pointé. C’est simple, pas une fois les courses de motos avec leur traînée rouge ne causeront de réelles interactions avec le reste de l'environnement (excepté une voiture de police coupée en deux, bien assez utilisée dans les différents matériaux promotionnels du film) et le grand final se résume [Attention Spoiler] en une grosse machine qui débarque du ciel (tiens tiens comme 90% des derniers actes de films à grand spectacle) et des drones qui sont lâchés dans toute la ville. Encore des drones… Comme si c’était là le symbole ultime de la menace moderne. Le plein potentiel est complètement gâché quand le dit vaisseau érafle à peine quelques immeubles en se contentant de se crasher gentiment par terre. Ne mentionnons pas le retour de Jeff Bridges, uniquement là pour tisser un lien bien maigre avec les films d’origine (ce pauvre Sam est à peine mentionné). Bien que l'environnement rétro de l’univers de Kevin Flynn reste un aspect agréable, sa présence est assez superflue.

Et le spectacle dans tout ça ? Car, on ne va pas se mentir, on vient avant tout et pour tout pour en prendre plein les mirettes. Même si on n’atteint pas la maestria de ballet de couleurs et de musique électro du précédent film (avec les Daft Punk à la composition), le film s’en sort avec les honneurs grâce à des scènes énergiques boostées par la bande son de Ninch Inc Nails qui prennent le relais ici en sortant le gros attirail de sons pétaradants. Et bien que les séquences de poursuites, notamment celles de la fuite sur l’eau virtuelle soient efficaces, il manque une vraie union entre bande son électrisante et ballet de couleurs que "Tron : L’Héritage" générait haut la main, au point où les musiques étaient moteur de l’action et non l’inverse. Les effets spéciaux d’ILM sont à la pointe de ce qui se fait aujourd’hui de mieux et leur incursion dans le monde réel fonctionne bien. La qualité de la 3D, autre argument marketing venu d’un autre temps, est à souligner et pourtant l’auteur de ses lignes ne la supporte guère. Ici on sent un effort dans le choix des cadrages, la façon de penser son long clip vidéo comme une vraie expérience immersive où chaque plan se voit doté d’une véritable profondeur de champs et d’une composition qui rend pour une fois justice à ce procédé que très peu de cinéastes savent gérer à bon escient.

On est loin de la catastrophe redoutée avec les premiers visuels, mais on est malheureusement à des années lumières de l'émerveillement provoqué par les œuvres qui précèdent ce "Tron:Arès". "Tron : Paresse" ? Un peu beaucoup même, tant le film pille allégrement son héritage de science-fiction mais peut se targuer d’en mettre plein la vue. Et même si les idées ne sont qu’esquissées, on peut espérer que pour un prochain volet, la saga puisse passer la 4ème et rendre son monde de nouveau unique et moins formaté. Il y a pour cela, peut-être besoin d’une mise à jour finalement, une vraie.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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