TOUTES POUR UNE
POUR : La revanche des mousquetaires
1625 en France. Les musulmans convertis sont expulsés par Louis XIII. Sara, une jeune femme morisque est délivrée d’un convoi par trois mousquetaires, Athos, Portau et Aramitz. Mais lors de leur première halte nocturne, Sara découvre qu’il s’agit en fait de trois femmes déguisées. Elle se joint finalement à elles, en se grimant, prenant alors le nom de Gascon décédé dans un duel, D’Artagnan. Il va s’agir pour elles de devancer 50 mercenaires, lancés à la poursuite du carrosse de la Reine, afin de prouver que celle-ci, n’a pas déserté pour retourner à Madrid…

C'est un film qui doit trouver son public. Impérativement. Peu diffusé, peu vu, attaqué de toutes parts par les masculinistes et autres rabat-joies à la vision étroite (Allociné a été forcé de fermer les avis des spectateurs tant le film se faisait descendre par des commentaires haineux et face au nombre anormal de nouveaux comptes créés dans le but de lui mettre la note la plus basse), "Toutes pour une" a pourtant un potentiel énorme. C'est un film de cape et d'épée filmé comme un western. On retrouve les grandes étendues traversées à dos de chevaux dans un format scope, le soleil ardent et le côté cracra des personnages, des scènes épiques où on se bat à 4 contre 50 (véridique !), mais aussi de l'amitié, de la loyauté et du panache - beaucoup de panache. Tout cela servi s'il vous plaît, par un casting féminin qui a eu l'air de sacrément bien s'amuser sur le tournage.
Les fabuleuses Oulaya Amamra, Sabrina Ouazani, Déborah Lukumuena et Daphné Patakia jouent des mousquetaires au caractère bien trempé, ceux qui auraient inspiré Alexandre Dumas ou le contraire, on ne sait pas bien, précise l'encart en début de film. Parce qu'un caractère bien trempé et de la folie, il en faut et pas qu'un peu pour se déguiser en homme, et (pire !) en mousquetaires quand on est une femme au XVIIe siècle. Bien conscientes des enjeux qu'elles risquent, ces mousquetaires là le font pour vivre bien plus que pour survivre. Vivre libre, sans peur de se faire violenter pour son genre. Et pour ça, il faut tout d'abord apprendre à faire l'homme, c'est à dire agir en pensant : « le monde est à toi, tout t'appartient » comme le dit Aramitz au jeune d'Artagnan qui vient de rejoindre la bande.
« J'ai voulu faire un film insolent, avec du panache. Je me suis tout permise. » raconte Houda Benyamina (réalisatrice de « Divines ») dans une interview pour France culture. Et en effet, en voilà un film culotté qui mélange bagarres à l'épée et thématiques queer, course-poursuite à chevaux et déconstructions de genre (dont une scène d’anthologie dans une calèche où Déborah Lukumuena crève l'écran, débordante de l'énergie de Portau). Toutes ses thématiques jouissives sont accompagnées d'une mise en scène empruntant autant au western spaghetti qu'aux films de cape et d'épée, magnifiant les personnages comme les décors naturels qu'ils traversent en usant autant que possible de lumière naturelle, créant des ambiances tour à tour épiques, naturalistes et intimistes.
Cette version des mousquetaires qui n'a rien à envier à ses homologues masculins (plutôt le contraire, si on parle d'adaptation) a donc un public à rencontrer d'urgence, en salle si possible malgré la difficulté à l'y trouver, ou en VOD dès qu'il sera disponible. Promis, vous ne serez pas déçues du voyage…
Amande DionneEnvoyer un message au rédacteurCONTRE : « T’es un homme, t’es libre »
Si l’intention d’adapter "Les Trois Mousquetaires", en prétendant que c’est en fait Alexandre Dumas qui s’est inspiré des aventures de 3 femmes grimées en hommes partait d’un concept intéressant, le résultat est malheureusement bien moins heureux. Le nouveau film de la réalisatrice de "Divines", Houda Benyamina, qui entre temps avait mis en scène le documentaire sur Diam's, "Salam", rate en effet totalement le coche niveau comédie, tout en assurant tout juste le spectacle niveau action. Car en prenant le plis d'assumer le féminisme, principalement en s'acharnant à tourner en dérision le genre opposé, le scénario s'enlise dans des situations ridicules et quelques dialogues simplistes.
Pourtant il y avait là un certain propos, ne serait-ce que dans les affirmations de départ (« avec une bite on a moins peur » ou « t'es un homme t'es libre »). Mais au final, malgré le côté moderne des combats, mêlant épée et poings, une seule scène se distingue comme percutante (celle du carrosse, où Déborah Lukumuena affirme tout son talent, avec de complexes dialogues visant à affirmer pour un mâle noble, son droit de pleurer). Le reste fait flop régulièrement, qu'il s'agisse d'apprendre à « diriger son jet », de faire demander pardon à des voleurs tout nus, ou de l'apprentissage du galop... Ajoutez à cela des chansons modernes qui ne servent à rien et un choix d'éclairage naturel qui rend nombre de scènes illisibles et on est pas passé loin du désastre total.
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur