THUNDERBOLTS*

Un film de Jake Schreier

Le renouveau (potentiel) de Marvel

Yelena Belova, la sœur de la célèbre Black Widow, a beaucoup à encaisser en ce moment : entre la perte brutale de sa sœur élevée au rang d’icône et son travail de tueuse à gage pour une certaine Valentina de Fontaine qui commence à lui peser, Yelena est au fond du trou. Alors qu’elle s’est jurée que cette fois c’était la dernière mission avant d’intégrer un boulot plus honorable, elle tombe dans un piège qui la confronte à d’autres agents laissés pour compte. Pour s’en sortir, ils seront forcés de collaborer ensemble tandis qu’une menace insoupçonnée se profile à l’horizon…

Le 36ème long métrage de l’écurie Marvel Studios se voit offert l’honneur de conclure une phase 5 en dent de scie pour ne pas dire complètement déceptive. Entre bides aux box-office sur les licences Thor ("Thor and Thunder" de Taika Waititi), Ant-Man ("Quantumania" de Peyton Reed) et même plus récemment "Captain America : Brave New World" de Julius Onah qui a déçu sur l’autel sacré des billets verts (quasiment 200 millions de dollars de budget pour 414 millions au box-office mondial), mais aussi au niveau critiques presses et spectateurs. Le constat est lourd pour le studio : après avoir initié le plus gros univers connecté au cinéma avec plus de deux décennies de domination au box-office, la machine tourne en rond et le public n’est plus dupe. En résulte les exemples cités plus haut avec des chiffres en baisse et la volonté du studio de faire de son univers un monde ultra-connecté à base de séries télés et autres produits dérivés qui ont fini par lasser une partie de son public. Peut-être pas le public plus récent, mais celui de la première heure qui trouve en "Avengers : Endgame" la véritable fin d’une ère désormais révolue.

Et "Thunderbolts" à la superbe idée de prendre cet axe pour son histoire : les choses anciennes sont mortes, Tony n’est plus (sa tour est même rachetée par une entreprise douteuse) et le monde n’a plus d’Avengers sur qui compter. Un peu comme nous finalement qui avons découvert en 2008 avec ébahissement Tony Stark en "Iron Man", mais qui n’arrivons pas à nous attacher à un nouveau personnage depuis la mort de nos héros emblématiques. Captain n’est plus, la Veuve Noire non plus et Thor ou Hulk ne sont que l’ombre d’eux-mêmes. Le constat est partagé par Yelena (Florence Pugh toujours superbe et touchante) qui constate un vide autant dans sa vie avec la disparition de Natasha - La veuve Noire que largement dans le sens de son existence. Tout semble avoir perdu sa saveur et la séquence introductive du film n’est ainsi pas dénuée de charme. Même s’il faut se coltiner un premier acte assez laborieux pour rassembler tout ce beau monde issu de séries et autres films dérivés de l’univers Marvel et aussi justifier une intrigue toujours aussi généreuse en bavardages d’expositions au lieu de véritablement mettre en scène ses propres enjeux. Comme cette histoire de création d’un nouveau « Superman » via la science, afin que les simples mortels qui peuplent ce monde arrivent à retrouver un semblant de contrôle au milieu des menaces extraterrestres et quantiques.

Comme dans ses précédents travaux, dès que Marvel tente de mettre en images ces concepts passionnant qui arrivent à lier cet univers fantastique à une réalité plus terre à terre, le studio échoue. Jamais, contrairement avec le cas avec des accords de Sokovie dans "Captain America : Civil War", le métrage ne prend le temps de vraiment représenter ce qui s’avère être un des points centraux de l’intrigue : la perte des héros et le fait que les habitants de New-York soient orphelins. Une intention qu’un certain "Batman V Superman" ne renierait pas et n’aurait pas rechigné à mettre en scène (oui oui, on ose). Nous n’allons rien dévoiler des quelques surprises du script, mais sachez que le méchant qui n’est pas vraiment méchant est une réussite surtout parmi la liste interminable des bad guys interchangeables qui jalonnent la franchise. Son développement fait écho directement à la bataille intérieure qui habite ces bras cassés et permet au film de se rappeler ce qui en constitue l’essence : ses personnages. Même si certains de la bande sont laissés sur le carreau (RIP Taskmaster, véritable insulte pour le personnage), on peut saluer l’effort d’ensemble d’une écriture qui tient la route et même si elle n’est pas subtile pour un sou aborde un sujet difficile comme celui de la dépression avec une malice, ceci dans un dernier acte surprenant.

D’enjeux de fin du monde nous sommes passés à des choses plus intimes mais tout aussi destructrices. Mention spéciale également pour la bande originale du groupe de rock expérimental Son Lux qui nous offre des mélodies aériennes et épiques qui nous marquent les tympans et ça, pour une production estampillée Marvel, c’est un petit exploit. Alors pour vous rassurer on peut vous dire que vous n’avez pas besoin d’avoir vu les dizaines de films et séries de la phase 5 pour comprendre ce produit étonnement soigné, assez détaché de l’ensemble pour ne pas crouler sous le cahier des charges. En espérant que tout ceci ne soit pas un coup d'esbroufe.

Germain BrévotEnvoyer un message au rédacteur

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