THE LAST SHOWGIRL

Un film de Gia Coppola

The Last Vegas

Lorsque Shelly, danseuse de cabaret quinquagénaire et expérimentée, apprend que son spectacle quasi-trentenaire à Las Vegas sera brusquement arrêté dans les deux semaines à venir, c’est le choc. Entre ses doutes quant à la nouvelle orientation à donner à sa carrière et son désir de réparer la relation tendue avec sa fille, c’est le vague à l’âme qui finit par la gagner…

À peine une semaine avant que ne débarque en salles le nouveau long-métrage de Gia Coppola ("Palo Alto"), une poignée de médias – et pas seulement américains – n’ont pas manqué de faire une partie de leurs choux gras sur l’échec de Demi Moore à avoir obtenu l’Oscar de la meilleure actrice pour sa performance dans "The Substance". On en devinait bien l’angle : voir l’actrice sexagénaire, alors favorite du scrutin, échouer au dernier moment face à Mikey Madison ("Anora") a en effet pu donner à certains la sensation de revivre ce que le film de Coralie Fargeat pointait précisément du doigt, à savoir la mise au placard d’icônes autrefois célébrées et désormais éloignées des canons de beauté normatifs au profit de versions plus jeunes, plus sexy et plus soumises au male gaze ambiant. On peine à effacer cet angle de notre esprit en découvrant "The Last Showgirl", tant ce commentaire à la fois féministe et parabolique sur le vieillissement des femmes et l’ambivalence des points de vue auxquels il se voit soumis infuse le récit de bout en bout sans en être pour autant la colonne vertébrale. Et si le jeu des comparaisons n’est pas à réclamer pour le coup, force est de constater que sans angle neuf ni subversion adéquate, c’est la norme qui revient au galop, clichés et poncifs inclus.

Vu que toute la promo paraît centrée davantage sur elle que sur le film lui-même, on parie déjà que Pamela Anderson n’imposera pas ici un come-back artistique du même calibre que celui de Demi Moore. D’abord parce que la différence reste flagrante sur le jeu d’actrice (même si l’ex-star d’"Alerte à Malibu" a le mérite de s’être livrée corps et âme à son rôle), ensuite parce que cette énième histoire de star glamour confrontée au double spectre de la vieillesse et de la déchéance (avec tout ce que cela suppose d’espoirs qui s’effilochent et de liens familiaux à reconstruire) tend à rabaisser quelque peu l’aura d’une star qui, pour le coup, a su peu à peu s’affranchir des canons en vigueur pour réorienter sa carrière et contrer son image de playmate sexy. Pour le coup, voir la belle Pamela singer très sérieusement la meneuse de revue décatie dans ce qui s’apparente presque à une version féminine de "The Wrestler" (avec le cabaret à paillettes en lieu et place du catch professionnel) sonne presque comme une invitation à revenir dans le territoire des lieux communs sur les paradoxes de la (vie de) célébrité. Balisé de A à Z, le scénario de Kate Gersten enfile des poncifs que même nos téléfilms les plus conventionnels n’oseraient même plus ressortir pour chatouiller le pathos. Les satellites dramaturgiques qui entourent notre héroïne soumise au vague à l’âme se coulent dans le même moule, d’un Dave Bautista sans relief dans son rôle de régisseur au grand cœur jusqu’à une Jamie Lee Curtis à fond dans la caricature d’épave flasque et cramée aux UV – facepalm assuré devant sa danse en solitaire sur fond de Bonnie Tyler.

Si prétendre vouloir révéler l’envers du rêve américain est un enjeu de cinéma qui fait aujourd’hui figure de lapalissade, la plus jeune réalisatrice du clan Coppola ne peut compter que sur sa timide relecture de Las Vegas en tant que territoire des laissés-pour-compte pour apporter un peu de vibration. Son parti pris de laisser hors-champ le spectacle de Shelly (sauf lors d’une scène finale perçue comme un faux apogée) et de capturer majoritairement des espaces déserts et délabrés au sein d’une ville connue pour son artificialité bling-bling apparaît fort bienvenu, sans pour autant tutoyer le degré de virulence et de puissance subversive dont avait fait preuve Paul Verhoeven dans son génial "Showgirls" – difficile de ne pas y songer lorsque sont dévoilées les scènes en coulisses. Pour le reste, sa mise en scène ne propose rien qui pourrait aider à contrer le conformisme du propos, la faute à un filmage caméra à l’épaule qui suinte l’amateurisme (voire l’effet de style pseudo-naturaliste) et à un chef opérateur visiblement presbyte qui floute les trois quarts du cadre un plan sur deux. Trop d’évidents soucis de finition, signe d’une forme lâche qui peine à soutenir un fond cliché et sans surprise, entérinent moins l’échec que l’anonymat pur et simple d’un projet non sans âme mais clairement sans substance.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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