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SUR LA TERRE COMME AU CIEL

L’éveil au monde

Deux sœurs aussi rousses l’une que l’autre, vivent avec leurs parents dans une communauté religieuse isolée, au milieu des bois. Dissipée, l’aînée, Sarah, profite qu’on l’envoie chercher un plat chez une voisine, pour s’enfuir. Clara, ne comprenant pas son geste, décide de cacher le carnet à dessins que Sarah gardait sous son matelas et de partir à sa recherche à Montréal, une carte postale, déchirée par ses parents, lui laissant croire qu’elle pourrait être là-bas. Elle débarque alors chez Louise, sa tante…

C’est le portrait d’une jeune fille, sur la fin de l’adolescence, à laquelle on a inculqué depuis son enfance, que seule sa communauté sera « sauvée », et que le reste du monde n’est constitué que de personnes « égarées », que concocte la réalisatrice québécoise Nathalie Saint-Pierre, dont c’est le troisième long. Frappée par la capacité de Donald Trump à endoctriner idéologiquement les foules, elle a fait sien le scénario de Marika Lhoumeau, qui avait connu une histoire similaire dans sa famille, lié à l’endoctrinement religieux. Et c’est à une jeune actrice formidable, Lou Thompson, presque de tous les plans, dont elle capture les errances et les détails d’un regard changeant, de l’espoir à l’incompréhension, du refus de la résignation à la joie trouvant son chemin au milieu de tous ses a priori.

Centrées sur l’exploration progressive du doute, les pensées de la jeune fille sont exprimées avec une certaine par une voix-off qui va et vient, traduisant l’évolution du regard du personnage sur ces autres qui vivent malgré tout, en opposition à sa communauté qui attend juste la mort. A l’esthétique uniforme des premières scènes dans la communauté (contrastes du roux des cheveux, du vert des champs et du noir des tenues), succède le caractère bigarré d’un Montréal où les gens ne sont ni noirs, ni blancs, pas même le SDF rencontré par hasard dans un parc, ni la tante Louise, à la joie affichée mais portée sur l’alcool. Incarné par une Edith Cochrane ("Une révision") habitée, ce personnage est également l’un des points forts du métrage, par la bienveillante qu’il dégage, malgré ses rancœurs et les démons qui le ronge. Une belle histoire d’éveil à un monde certes rude, mais riche d’une complexe humanité, loin des visions sectaires univoques.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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