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SALOUM

Un film de Jean-Luc Herbulot

Ciné-slalom au Sénégal

Fuyant un coup d’État avec une grosse cargaison d’or volée et en exfiltrant un baron de la drogue de Guinée-Bisseau, un groupe de mercenaires appelés les « Hyènes de Bangui » trouvent refuge dans un camp de vacances du Sine-Saloum et font en sorte de se fondre parmi les vacanciers. Mais il se pourrait que ces derniers cachent bien des choses, et que les Hyènes ne se soient pas retrouvées ici par hasard…

Saloum film movie

On aurait bien du mal à cacher qu’en allant découvrir "Saloum", on avait déjà affûté bien plus fort que d’habitude notre traqueur de références et de plagiats. La dernière fois que l’on s’était frotté au cinéma de Jean-Luc Herbulot, c’était à l’occasion de la sélection de son film "Dealer", présenté en compétition des Hallucinations Collectives de Lyon, il y a sept ans. Et on avait pour le coup particulièrement grincé des dents puisqu’en dépit des dénégations de son auteur, le soupçon d’avoir assisté à un plagiat intégral et éhonté du "Pusher" de Nicolas Winding Refn n’avait pas suffi à nous donner envie de juger le film pour ce qu’il proposait avant tout, à savoir la banale descente aux enfers d’un petit dealer en survêtement. Si l’on en croit les avis glanés ici et là en festival, "Saloum", son nouvel essai, semblait lui aussi destiné à ne jamais trouver le chemin des salles. Et là, disons-le, ça aurait été d’autant plus regrettable que le résultat est une sacrée surprise. Avec ce néo-western pour le coup réellement singulier et imprévisible dans sa progression scénaristique, non seulement Herbulot réussit enfin à gérer convenablement ses références en les superposant à son récit, mais son habileté à jouer à loisir sur les bascules narratives prend corps jusqu’au générique de fin.

A priori, rien que de très banal sous le soleil de l’Afrique équatoriale : trois mercenaires en mode "Les Douze Salopards", chargés d’exfiltrer un dealer sud-américain, se retrouvent bloqués dans un coin reculé des rives du Sénégal où vit une communauté à première vue tout ce qu’il y a de plus accueillante… Sauf que… Bon, on s’en voudrait vraiment de vous spoiler la suite, et on fera donc en sorte que la surprise reste entière pour les néophytes, mais sachez juste que l’ambiance va peu à peu se teinter de quelques coups de théâtre, virages narratifs à 180° et télescopage des genres sans que cela ne vienne nuire à la logique purement diégétique du récit. Perfusé autant au foklore sénégalais (la réalité sociale et le vivier ésotérique local ont très clairement voix au chapitre dans cette intrigue) qu’à une tension pressurisée que n’aurait pas renié le John Carpenter d’"Assaut" (si si), Herbulot arrive à équilibrer toutes les forces qui s’agitent dans son cadre et dans son récit, tout en enjolivant l’ensemble par une mise en scène d’une incroyable beauté plastique. Si certaines scènes d’action ont parfois tendance à céder à la facilité de la shaky-cam illisible, rien n’enlève la satisfaction d’assister à un vrai shot de cinoche référentiel et sincère, porté par un cinéaste francophone qui a enfin trouvé le bon angle et peaufiné son style. Son prochain long-métrage est donc d’ores et déjà des plus attendus.

Guillaume GasEnvoyer un message au rédacteur

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