RAPACES
Un thriller poisseux redoutablement efficace
Synopsis du film
Samuel, journaliste pour un magazine d’investigation, emmène sa fille Ava, stagiaire, sur les lieux de divers faits divers, d’une pendaison à un meurtre de jeune femme défigurée à l’acide. Face à un père en détresse, il demande à Ava de se faire passer pour une amie de la victime, afin de lui soutirer quelques informations. Mais alors qu’il croit pouvoir rapprocher deux cas, dont l’un jugé il y a déjà un an et dont le meurtrier s’est suicidé en prison, sa rédactrice en chef lui demande de se concentrer sur une autre affaire. Il propose alors à un collègue d’échanger leurs téléphones, afin qu’il puisse être plus près de lieux et poursuivre sa propre enquête…

Critique du film RAPACES
"Rapaces", second long métrage de Peter Dourountzis, découvert avec "Vaurien", démarre de façon éclatée, avec différents personnages, chacun menant son enquête à sa manière. Il y a Samuel (Sami Bouajila) et sa fille Ava (Mallory Wanecque, vue dans "Les Pires", "L’Amour Ouf") dont on n’est initialement pas sûr du statut, entre flics, détectives et journalistes, Christian (Jean Pierre Darroussin) qui s’intéresse à un fils qui aurait cuisiné son père, Solveig (Valérie Donzelli) qui tente de filmer des voleurs à l’arrachée à une terrasse de café, mais aussi Aubin (Stefan Crépon). C’est après qu’ils se soient tous retrouvés pour une réunion de rédaction du magazine Détective (véritable titre, avec lequel il y a ici un partenariat), que leurs statuts et rôles sont clarifiés, et que la véritable enquête peut commencer, Samuel et Ava profitant d’une affaire confié à un autre, pour poursuivre leur enquête, au mépris d’un potentiel danger.
Et la tension monte d’un cran, dès lors que la rédactrice en chef, tente de les joindre, obligeant à un tour de passe passe périlleux à distance, entre les téléphones. Véritable thriller, dont une bonne partie se déroule de nuit, "Rapaces" doit beaucoup à sa mise en scène, nerveuse, installant des situations particulièrement tendues, d’une poursuite avec un pick-up à un scène déjà culte dans un restaurant en bord de route, où la salle se vide progressivement piégeant potentiellement nos héros. Des scènes dignes des meilleurs polars des frères Coen ("No Country for Old Men"), qui empreinte également aux codes du western, convoquant au passage un monde qui a des oreilles partout, grâce à l’usage de la radio ou la cibi. Au-delà du titre aux multiples significations (qui sont les véritables rapaces ? ceux qui traquent et agressent les filles, ces journalistes aux méthodes peu orthodoxes, les lecteurs du magazine ou les spectateurs, avides de faits divers sordides…), le long métrage livre aussi une belle réflexion sur ce métier ingrat, la manière d’aborder des affaires (« ne pas penser comme un flic », s’intéresser uniquement à la victime…) mais aussi de rédiger des articles (« on écrit toujours le même article », on réécrit des chapeaux sensationnalistes…).
Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur