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PRAIA DO FUTURO

Un film de Karim Aïnouz

Quelques fulgurances pour un film hypnotique

Au Brésil, la « plage du futur » est connue pour être particulièrement dangereuse. La baignade de deux motocyclistes allemands, tous deux militaires de profession, tourne mal et les oblige à être secourus par les sauveteurs locaux. Malgré tout, l'un d'eux meurt noyé, son corps n'étant pas retrouvé. Le sauveteur qui avait tenté de lui venir en aide se rapproche alors de l'ami du défunt, avec lequel il commence une liaison...

Optant pour des plans simples et graphiques, "Praia do Futuro" s'ouvre sur des images de motos dans les dunes, et sur deux hommes évoluant en liberté le long d'un bord de mer sauvage et venté. À l'image de cette introduction, c'est à une composition simple de plans visuellement marquants, ou de scènes étrangement hypnotiques, que s'attache Karim Aïnouz, déjà auteur de "Madame Sata", remarqué à Un certain regard en 2002, et du touchant "Ciel de Suely" présenté à Berlin en compétiton en 2007.

Reparti bredouille de la Berlinale 2014, "Praia do Futuro" nous concocte une belle histoire d'amours homosexuelles, dont la complexité est plus suggérée que dialoguée, et qui dispose d'une approche moderne d'un certain romantisme (la scène dans les rochers face à l'océan démonté, la scène de la rame de métro...). Chapitré en trois parties, le film propose des sections inégales, mais qui sont en parfaite adéquation avec les événements ou moments abordés. On évolue ainsi de la luminosité de la rencontre sur les plages du brésil, vers la grisaille du quotidien et du temps des choix que représente d'exil à Berlin, au réveil brutal que constituent les retrouvailles avec un fantôme de la vie passée.

Proposant une approche frontale de la sexualité entre hommes, qui n'évite ni collisions physiques ni contact complice, sans pour une fois aborder d'insipides questions d'adultères, cette œuvre brésilienne finit par toucher par son portrait d'un jeune homme brésilien en pleine évolution (Wagner Moura, découvert dans "Troupes d'élite"). N'évitant pas les blessures ou les doutes liés à son caractère d'immigré, le scénario s'intéresse aux différences d'origines et de cultures, tout en dessinant le trajet d'un homme vers une conscience de soi en tant qu'adulte et vers l'affrontement de ses propres peurs.

Tout au long du métrage, les ellipses sont certes nombreuses, mais elles amènent une sensation de temps qui passe, impactant le caractère du jeune homme, comme sa manière d'agir. Et face à un quotidien usant, qui met à mal les relations, c'est dans certaines scènes aux allures clipesques où la musique aux mélanges de rythme moderne et de violons accompagne les mouvements de caméra, que les personnages prennent soudain des ailes. "Praia do Futuro" nous emporte alors au grès de fulgurances graphiques et émotionnelles qui restent imprimées à la rétine et au cœur un certain temps. Une expérience que certains qualifieront de naïve et d'autres de puissante.

Olivier BachelardEnvoyer un message au rédacteur

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