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LA PLAYA

Trouvez un bon coiffeur à Bogota

Depuis qu’ils ont dû fuir leur village à cause des guérillas faisant rage dans les milieux ruraux de la Colombie, Tomàs et son jeune frère cadet Jairo vivent dans une maisonnette avec leur mère et leur beau-père qu’ils détestent. Lorsque Jairo est mis à la porte par le compagnon de sa mère, Tomàs éclate et part à sa recherche, au cœur de Bogota…

Ne vous attendez pas à avoir de belles images de magnifiques bancs de sable balayés par une eau turquoise. À La Playa D.C, quartier de Bogota où se sont réfugiés bon nombre de coiffeurs afro-colombiens, il n’y a que du béton. Un cadre résolument urbain pour rappeler à ces émigrés des côtes pacifiques de Colombie à quel point la guerre perpétuelle faisant rage dans leurs anciennes jungles verdoyantes les a déracinés de leur milieu. Pour Tomàs, la nostalgie se retranscrit dans les souvenirs dilués d’une époque où sa mère lui faisait ses tresses, assise au milieu de la nature sauvage.

Aujourd’hui, il se retrouve à la rue, à cause d’un beau-père blanc qu’il hait, et qui a jeté son petit frère de douze ans, déjà junkie, hors de la maison. Bogota n’est pas une cité des plus accueillantes. Ville de blancs méprisant les noirs, les différences culturelles et le racisme ambiant n’aident en rien à la mixité sociale pourtant ici obligatoire. Tomàs, à la recherche de son cadet, ère sur la plage de béton mais tombe finalement sur le chemin de son aîné. Chaco a la classe, un pas assuré, la casquette de travers, il revient des « States ». C’est un maître pour dessiner des logos de marques de sport au rasoir sur la tête des afro-colombiens cherchant un pur look. Désœuvré, Tomàs s’engouffre dans cette activité qu’il voit comme une porte de sortie…

Juan Andrès Arango est à la base un directeur de la photographie. Forcément, cela déteint sur son premier film. Il apporte un grand soin à ses cadres, bien souvent très esthétiques. Lorsqu’ils se déplacent, les protagonistes sont souvent filmés de dos, comme c’est le cas dans la plupart des films d’auteurs branchés depuis que Gus Van Sant a lancé cette mode avec « Elephant », et cela donne tout de suite du cachet. Oui le film est beau, mais hormis le contexte social planté en l’espace d’un quart d’heure, l’intérêt de cette première œuvre est malheureusement très mince. Difficile de se passionner pour le destin de ces trois frères. D’ailleurs, le cadet junkie est vite mis aux oubliettes à la faveur des coups de rasoirs de Tomàs dans les cheveux de ses clients tandis que l’aîné finit par être sous-exploité malgré un charisme certain et une vie qui doit être un peu plus trépidante que les aspirations de Tomàs à devenir coiffeur. Au final, il est légitime de se demander si le véritable objectif du film n’est pas en réalité de dresser l’éventail des solutions capillaires possibles chez les jeunes afro-colombiens…

Alexandre RomanazziEnvoyer un message au rédacteur

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